Jacques Audiard ne fait pas dans
le cinéma tiède, consensuel, regardable par tous.
Après une période plutôt testostéronée
(De
battre mon cœur s'est arrêté, Un
Prophète, Les
frères Sisters…), il se tourne peu à
peu vers des univers plus féminins, moins violents (Les
Olympiades).
Emilia Perez est
presque une métaphore de ce tournant, avec une histoire abracadabrante
mais ô combien réjouissante, mettant en scène
un chef de cartel mexicain qui souhaite changer de sexe, aidé
par une avocate dépitée de participer à la
relaxe de criminels. Le tout chanté et dansé, sans
qu'à aucun moment on ait l'impression de visionner une comédie
musicale. Un véritable objet filmique non identifié
qui, si vous ne savez rien en entrant en salle, vous fait écarquiller
les yeux et frétiller des oreilles d'un bout à l'autre.
Rien n'est convenu ou attendu, les personnages sont extrêmement
loin du commun des mortels et pourtant ce conte de fées aux
aspects tragiques parle à chacun(e). Les quatre femmes ont
une détermination formidable, des parcours de vie où
le combat est nécessaire. Des tombereaux d'emmerdes leur
tombent dessus, elles se relèvent toujours. Presque toujours.
Jacques Audiard filme tout cela avec une flamboyance inimaginable,
une énergie énorme, c'est à la fois un régal
visuel et sonore de tous les instants et un récit qui ne
vous lâche pas, un film noir et un mélo en même
temps, c'est un opéra mais c'est du Cinéma.
