Ah, la jolie comédie…
la famille, encore, comme dans Les
miens, mais ici le propos et le traitement sont plus légers.
Un bon mot de Philip Roth, cité dans le film, résume
tout : Lorsqu'un écrivain naît dans une famille,
la famille est foutue. On pourrait aussi rajouter ce que dit
Nancy Huston à propos de la famille, What else ?
(Quoi d'autre ? Je traduis pour les encore plus ignares
que moi, question langue anglaise)
Bien sûr, la famille est ici algérienne et les choses
n'arriveraient pas de la même façon dans une famille
portugaise, australienne, sénégalaise ou française.
Quoique. Le mérite comme unique satisfaction, la honte comme
ultime humiliation, l'obligation de respect au sein du clan, les
secrets toujours et encore secrets, les mensonges inévitables
pour ne pas risquer le bannissement, le sexe caché, l'amour,
bien sûr l'amour, c'est beau l'amour mais surtout pas le désir
et j'en passe parce que la liste est longue, toutes ces choses qu'on
ne dit pas en famille, ou si peu, ou qu'on esquive et qu'on évoque
à mots couverts, biaisés, détournés…
Baya Kasmi et Michel Leclerc ont concocté un scénario
à l'apparence légère, une pure comédie,
mais le sujet, les sujets familiaux sont profonds, ils nous façonnent,
quoiqu'on dise et quoiqu'on veuille et ce verni fait de drôleries,
de quiproquos, de gags, de bons mots et de tout ce qui peut créer
de l'humour permet d'encaisser et de supporter les émotions
fortes que tout cela procure. La
Ligne, un autre film sorti le même jour aborde aussi
la difficulté des relations familiales mais sans recul, et
l'effet en est finalement beaucoup moins efficace. Il se trouve
aussi que Baya Kasmi, à la réalisation, insuffle bien
plus d'énergie et de personnalité à son film
que son compère Michel Leclerc n'en donne aux siens. Et que
dire de Ramzy Bedia, colosse aux pieds d'argile, capable dans la
même scène de faire sourire, rire, et pleurer pour
finir… Il y a certainement des faiblesses dans le film, des
facilités (les passages à la télé…)
mais ce n'est rien au regard des grandes qualités d'écriture,
de montage, de rythme et de direction d'acteurs de ce faux petit
film. Youssef a du succès, ce ne serait que justice si le
film en avait aussi.