Il paraît que cette "pièce
écossaise" (ainsi nommée, pour ne pas avoir à
prononcer le rôle titre) (remarquez, moi ça m'arrange,
question d'accent ou plutôt de manque d'accent) porte malheur
à ceux qui la jouent. Il paraît. Mnouchkine s'y est
un peu fourvoyée
il y a peu de temps, les spectateurs trouvant formidables…
les changements de décors. Anne-Laure Liégeois en
avait donné une version
formidable, en 2014, pleine de bruit et de fureur, mais aussi
d'humour et de contrastes.
Macbeth, c'est une sombre histoire autour du pouvoir, et des folies
qu'il engendre. Le couple devenu royal s'y perd, entraînant
avec lui tout un pays, il y a du sang, des cris, des pleurs, des
horreurs… mais il y a aussi, parce que Shakespeare sait ce
qu'est une pièce de théâtre, des échappées
drôles ou poétiques, des personnages qui supportent
le ridicule. La compassion est possible, la lourdeur est inévitable
mais elle est trouée par quelques scènes un peu absurdes
ou simplement doucement folles mais indispensables pour que la lourdeur
ne devienne pas pesante, plombante, insupportable.
Le film de Justin Kurzel escamote tout ce qui pouvait apporter un
peu de légèreté. Pas de portier (un type du
peuple, bourré, et égrenant quelques vérités
sur les puissants), très peu de Malcolm (jeune boutonneux
ambigu), pas de médecin (regard ahuri, presque second degré,
sur la folie de la reine), des sorcières fantomatiques (exit,
tout l'humour noir des premières scènes de la pièce)
et des scènes de combat rajoutées à foison,
le crime royal bien montré (dans la pièce, il est
hors-champ). Du coup, la lourdeur inhérente à l'histoire
remplit tout l'espace, les images sont lourdes, la musique est lourde
(magnifique, mais très imposante), l'interprétation
est lourde (Marion Cotillard s'en sort mieux que Fassbender qui
ne joue que sur deux registres, la folie gueularde ou l'introspection
murmurante), et les paupières du spectateur sont aussi, parfois,
un peu lourdes…