La justice restaurative met en
contact et fait dialoguer des victimes et des condamnés,
pour le même type de délit, mais pas pour les mêmes
affaires. Jeanne Herry, après avoir montré les rouages
de l'adoption dans le très beau et très émouvant
Pupille, s'attelle
à montrer le fonctionnement de ce dispositif judiciaire méconnu,
qui a pour mission d'ouvrir les points de vue, de parler avec des
personnes qui savent de quoi il retourne, et au bout du compte,
d'aller mieux, d'apprendre à revivre malgré tout.
Bien sûr, le récit s'attache probablement un peu trop
au bon côté des choses, il doit y avoir aussi des échecs,
des confrontations trop douloureuses. A
l'ombre des filles, qui montrait l'intervention d'un professeur
de chant dans le milieu carcéral féminin, était
de ce point de vue-là, moins angélique, moins didactique.
Mais le film de Jeanne Herry a beaucoup de mérites, en premier
lieu celui de faire la lumière sur ce type d'aide à
la réinsertion dans tous les sens du terme. Les victimes,
comme les coupables, sont elles aussi exclues de la vie, de leur
vie d'avant. Elles tentent de se reconstruire, et c'est passionnant.
Pour ne pas tourner en rond et se répéter, le scénario
propose une deuxième voie, toujours dans le cadre de la justice
restaurative. Une jeune femme veut revoir son violeur (son propre
frère) qui a été condamné et vient s'installer
dans la ville où elle habite. Elle est préparée
à cette entrevue par un tiers, membre des services pénitentiaires
d’insertion et de probation (SPIP). Cette procédure
est là aussi bien exposée, on comprend combien c'est
difficile de se replonger dans un passé traumatisant et comment
cela peut être salutaire.
Ce qui pourrait être un documentaire n'en est pas un. Et le
choix, comme dans Pupille, de faire jouer tous les personnages
par des acteurs connus se révèle étonnamment
pertinent. Ils sont tous incroyablement investis et crédibles.
Les scènes, parfois tendues, parfois éclairantes,
parfois libératoires, sont des vraies scènes de cinéma,
les émotions peuvent être énormes.
Et même si la façon de filmer est trop sage, le montage
un peu scolaire, le récit attendu, le film fait du bien.