Les chevaliers blancs *

Joachim Lafosse

L'histoire

Jacques Arnault, président de l’ONG "Move for kids", a convaincu des familles françaises en mal d’adoption de financer une opération d'exfiltration d'orphelins d’un pays d’Afrique dévasté par la guerre. Entouré d’une équipe de bénévoles dévoués à sa cause, il a un mois pour trouver 300 enfants en bas âge et les ramener en France. Mais pour réussir, il doit persuader ses interlocuteurs africains et les chefs de village qu’il va installer un orphelinat et assurer un avenir sur place à ces jeunes victimes de guerre, dissimulant le but ultime de son expédition...

Avec

Vincent Lindon, Louise Bourgoin, Valérie Donzelli, Reda Kateb, Bintou Rimtobaye, Jean-Henri Compère, Philippe Rebbot, Yannick Renier

Sorti

le 20 janvier 2016


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Chronique d'un désastre annoncé

 

Se servant d'un fait divers qui s'est transformé en affaire d'états, Joachim Lafosse fait le récit d'un mensonge colossal, monté par une ONG, qui fait croire à toute une population qu'un orphelinat se crée dans une zone déshéritée de l'Afrique, alors qu'il s'agit d'envoyer une centaine d'enfants en France, afin qu'ils soient adoptés par des familles qui ont financé l'opération. A la tête de cette vaste embrouille, un pompier et sa compagne, dont le film a le très grand mérite de ne pas en faire des monstres, juste des humains dépassés par leur engagement, par leur aveuglement, par l'énormité de ce qu'ils sont en train de commettre. L'histoire est intéressante, parce qu'il ne s'agit pas d'une arnaque financière, mais d'un ensemble de bonnes intentions qui se heurtent très vite d'une part à l'inorganisation matérielle et une méconnaissance des populations visées, et d'autre part à la moralité, à la conscience de chacun : les conflits germent très vite parce qu'au départ l'opération est douteuse.
Choisir Vincent Lindon pour le rôle était risqué, car il incarne depuis un moment des hommes simples et droits, dans lesquels on est fier de se reconnaître, pour ses rebellions naturelles, de "Welcome" à "la loi du marché". L'acteur est incroyable, donnant au personnage du chef de l'ONG toute son énergie, et pourtant faisant comprendre peu à peu comment les doutes le déstabilisent, lui font prendre les mauvaises décisions, l'enferrent dans une attitude tyrannique et aberrante. Ce type est au final, une ordure, mais il ressemble à tout un chacun. Louise Bourgoin, dans le rôle de sa compagne, n'est pas moins étonnante. Revêche malgré son sourire composé, les cheveux tirés, elle fait froid dans le dos et pourtant à aucun moment elle n'en fait trop, n'usant jamais de son charme ou de sa fantaisie, elle prouve qu'elle est devenue une comédienne à tous les sens du terme.
Le réalisateur excelle dans les scènes de tension, s'appuyant sur ses acteurs, montrant les faiblesses de chacun au moment où ils paraissent les plus forts, en appuyant sur la pauvreté de leurs arguments. C'est une chronique d'un désastre annoncé, une tragédie minable, un Shakespeare du pauvre, un concentré d'erreurs humaines tellement évitables…

Vos commentaires pour ce film

Ils sont en stand-by dans un dispensaire de brousse, avec le temps les doutes, les malaises s’installent.
Dans des décors somptueux le film n’est pas déplaisant à regarder, avec des interprètes irréprochables, Valérie Donzelli, Louise Bourgoin, Reda Kateb et Vincent Lindon.
L’ambigüité des personnages constitue l’une des clés de la réussite du film, l’ONG passe progressivement de son objectif humanitaire à un sordide business dont les enfants constituent la marchandise. Montrer sans leçon moralisante les convictions et les dérives possibles de l'humanitaire, l’affaire n’est pas simple.
Le héros n’est pas un salaud intégral, c’est un homme dépassé par les événements, le scénario laisse au spectateur une marge de liberté dans son jugement moral.

Dominique P, le 30 janvier 2016

 

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