La loi du marché *

Stéphane Brizé

L'histoire

À 51 ans, après 20 mois de chômage, Thierry commence un nouveau travail qui le met bientôt face à un dilemme moral. Pour garder son emploi, peut-il tout accepter ?

Avec

Vincent Lindon

Sorti

le 19 mai 2015


La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Vérité radicale

 

Stéphane Brizé ne fait pas dans le consensuel, que ce soit dans le choix de ses sujets, ou bien dans ses partis pris de mise en scène. Cette radicalisation va croissante, au contraire de bon nombre de jeunes (ou pas) réalisateurs qui, passé leur premier film novateur et prometteur, tombent dans une certaine facilité et cherchent à séduire le public le plus large possible.
"Je ne suis pas là pour être aimé" (titre prémonitoire ?) avait pas mal de charme et contait, au final, une histoire d'amour plutôt douce, malgré quelques aspects plus sombres que dans n'importe quelle comédie romantique. "Quelques heures de printemps" décrivait la relation entre une mère malade ayant choisi d'en finir et son fils, incapables de communiquer. Aride de par son sujet et par la façon de montrer la dureté des rapports, le film forçait l'émotion grâce à son récit classique, en crescendo dramatique.
Ici, cette loi du (super)marché ne cherche jamais à séduire et pourtant sidère. C'est l'effroyable et inexorable récit d'un homme au chômage confronté d'abord à l'inhumanité des structures d'aide et des mécanismes qui gèrent la recherche d'emploi, des stages qui ne servent à rien aux entretiens d'embauche dématérialisés, en passant par des séances d'analyse du comportement, culpabilisantes et d'une efficacité douteuse. Puis, l'homme ayant trouvé un emploi de vigile dans un supermarché, on assiste - terrassé, épouvanté, abruti face à la réalité des choses – à la perte progressive des valeurs humaines, avec les compromissions inévitables, les énormités qu'on est obligé d'avaler devant le cynisme de ceux qui veulent conserver la bénédiction des dirigeants. La crise n'est pas rampante, elle est bien debout, elle fauche tout ce qui bouge et qui ne rentre pas dans le rang. Le récit est totalement démoralisant, rien qui puisse donner de l'espoir, l'avenir est sombre et même les frères Dardenne semblent plus optimistes que Brizé. Les choix de mise en scène et de direction d'acteurs font pencher l'ensemble vers une vérité quasi documentaire. Hormis Lindon, tous les autres sont des acteurs non professionnels, et jouent tous ou presque leur propre rôle, du syndicaliste à la caissière. La caméra à l'épaule, scrutant les visages, insistant sur les silences, décortiquant les situations, peut donner la nausée, autant par son mouvement (l'image tangue sans cesse) que par la sensation d'enfermement, de malaise, de tristesse profonde. Lindon lui-même n'a pas volé son prix d'interprétation à Cannes, il paraît incroyablement juste, sans effets, ravagé, comme éteint au dehors, mais avec au fond des yeux, une colère latente. Rien que pour lui, le film vaut d'être vu. Pour le reste, il faut accepter ce cinéma-là, anti spectaculaire, terriblement réaliste, où l'on peine à entrevoir de la lumière.

Vos commentaires pour ce film

Vincent Lindon, tient magistralement son rôle, (il a eu une palme à Cannes), malgré cela je me suis ennuyé dans ce film, les autres acteurs sont bons (acteurs non professionnels), le scénario est lent décousu et la fin peu optimisme.

Dominique P, le 23 mai 2015

 

J'aime Vincent Lindon, c'est un grand acteur, il choisit bien ses films et il est toujours juste et vrai, sobre il n'en fait pas des tonnes.
Le scénario rapidement raconté ressemble à celui de "jamais de la vie" avec Olivier Gourmet. Un homme de 51 ans se retrouve au chômage, après avoir lutté avec ses amis syndicalistes pour conserver des emplois et devient vigile dans un supermarché.
La différence se fait au niveau du traitement par le réalisateur.
Ce film est centré sur l'humain. Cet homme a une vie, des projets, une femme, un enfant au lycée, une banquière, des collègues, il est ancré dans la vie. Il n'y a pas de "méchants délinquants" dans ce film, seulement des règles absurdes, des choix moraux, une violence ordinaire qui n'en est pas moins meurtrière parfois.
Nous accompagnons Thierry dans sa vie, on souffre avec lui, on sourit aussi, on est parfois étonné. On aime son intégrité et on est gêné de le retrouver dans des situations très pénibles du point de vue moral.
Un bon moment même si cela n'est pas vraiment confortable.

Isabelle E-C, le 24 mai 2015


Cela aurait put être un très bon documentaire sur notre société.
Qu'apporte la fiction si ce n'est qu'une plus grande reconnaissance (comme le fait que le court métrage d'origine est inconnu) ?
Oui il y a Vincent Lindon qui est très vrai, très crédible, mais il y a un gros MAIS il a la même tête du début à la fin.
Pas d'évolution, c'est quand même dommage pour 1h30 de récit !
Oui, je suis désappointé.


Kosmo, le 3 juin 2015

 

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