Les 2 Alfred sont deux peluches,
des doudous indissociables qui ne font de mal à personne
et se font balader sans vraiment intervenir dans le récit.
Mais ce sont aussi les deux frangins, les deux Podalydès,
qui ont une connivence unique et un regard amusé, caustique
mais aussi vaguement indulgent sur le progrès, la vie moderne
et ses aléas. Ils évoquent la mort et les pompes funèbres
(Adieu Berthe)
ou les burn-out et l'usure des couples (Comme
un avion), ou bien encore les nouvelles entreprises qui
ne vendent que du vent (ces 2 Alfred)… A chaque fois,
il y a du Tati, de l'absurde, de la poésie, un certain éloge
du dérisoire, des histoires faites de bouts de ficelle et
cela peut confiner au (presque) sublime, revoyez Comme un avion
pour vous en convaincre. Mais cela peut aussi tourner en rond, noyer
les surprises, ressasser l'absurde moderne dans un mécanisme
répétitif, comme ici : ces deux Alfred ne bousculent
rien. Bien sûr, l'humour est là, décalé,
aigre-doux. Sandrine Kiberlain refait sa grande gigue un peu autoritaire
mais touchante tout de même, et on l'adore, forcément.
Les deux frangins s'entendent encore bien mieux que des frères
et leur complicité fait du bien à voir, sauf qu'elle
n'est pas toute neuve et là où elle ne faisait que
passer dans leurs films précédents, elle est ici le
moteur du récit, un moteur presque trop bien huilé…
Et pourtant, comme on aimerait l'aimer, ce film qui promettait d'être
dingue et qui au contraire ronronne et ne décolle jamais,
s'enlisant même dans des gags un peu attendus sur les visioconférences,
ou sur les énervements inévitables face à la
technologie censée rendre la vie plus simple.
L'ensemble est fort loin d'être désagréable,
le film se laisse voir avec plaisir, mais manque singulièrement
de poivre et rate la poésie. Dommage, tant pis mais pas grave
: les deux frangins feront mieux, la prochaine fois…