Ounie Lecomte est née en
Corée, a été abandonnée et placée
dans un orphelinat. Puis elle a été adoptée par
une famille française. Même si son film ne se veut pas
une reconstitution de cette partie de sa vie, il est en grande partie
autobiographique. Il traduit des sensations, des sentiments forts,
au travers du récit à la fois très précis
et impressionniste de quelques événements de la vie
d’un orphelinat. Le lieu est un personnage à part entière,
donnant une illusion de réalité, à travers le
regard de la petite fille. C’est d’ailleurs l’unique
point de vue offert par le film. Jamais on ne saura les raisons de
l’abandon, jamais on n’entendra de conversations entre
adultes hors de la présence de l’enfant. Ce parti pris
est particulièrement efficace et porteur de sens lorsqu’elle
quitte l’orphelinat, les chants des enfants s’estompent
alors, on est envahi par un double sentiment qui est aussi celui de
la petite fille, le soulagement de quitter cette douce prison mêlé
à la peur de l’inconnu.
D’une certaine façon (la volonté de bâtir
le récit au travers du regard de l’enfant), cette œuvre
se rapproche de Yuki &
Nina, récemment sorti…
Là où la réalisatrice aurait pu faire tomber
le film dans un sentimentalisme larmoyant (et il y avait de quoi),
elle parvient au contraire à garder un recul d’une grande
pudeur, elle ne s’apitoie pas sur le sort de son personnage
(elle-même, pourtant…), elle ne fait pas des autres personnages
des caricatures, la vie dans l’orphelinat n’est pas un
enfer et le regard final de l'enfant peut être interprété
de tant de façons différentes qu’on ne peut que
la remercier de laisser au spectateur le soin d’écrire
les suites possibles.