Pourvu que Malraux se soit trompé,
en disant que "le 21ème siècle sera spirituel ou
ne sera pas" (en réalité, il semble qu’il
n’ait absolument pas dit cela, mais la légende est tenace),
parce que les religieux de tous poils, chrétiens comme dans
"Des hommes et des dieux",
ou musulmans comme dans ce "Shahada" (non, il ne s’agit
pas d’une version pour édentés de la rengaine
d’"un homme et une femme") n’ont pas une vision
de la vie particulièrement ouverte. On voit ici des homosexuels
ne pas pouvoir vivre leur relation en toute liberté (c’est
le moins qu’on puisse dire) et une jeune femme étant
obligée d’avorter dans l’illégalité,
au vingt-et-unième siècle, en Allemagne (il paraît
que c’est un pays civilisé, mais on doit pouvoir trouver
pires situations en France)…
Et Dieu, dans tout ça ? Le sujet m’intéressant
à peu près autant que l’existence du père
Noël, la foi (je préfère le foie gras) et la possibilité
d’un au-delà me sont parfaitement étrangères.
On peut imaginer qu’un spectateur croyant ou au moins ayant
quelques interrogations sur une présence divine sera plus touché,
voire passionné. Les autres (dont moi, donc) en resteront à
admirer l’emballage, la forme : c’est un film choral plutôt
bien huilé, avec trois histoires distinctes se croisant parfois,
mais sans véritables rencontres déterminantes. Sombre,
lourd, sans respirations, ayant un véritable caractère
et un style flamboyant, il maintient en haleine presque d’un
bout à l’autre, avec des personnages forts, porteurs
de symboles (et de clichés aussi), pas figés, interprétés
avec conviction par de jeunes comédiens.
Il est intéressant de constater que des réalisateurs
"issus de l’immigration" incarnent une partie de la
créativité et de l’avenir des cinémas allemand
(Burhan Qurbani ou Fatih Akin) et français (Kechiche). Des
deux côtés de la frontière, ils abordent des sujets
sensibles et n’y vont pas avec le dos de la cuillère
: ils ont des manières de filmer plutôt percutantes et
signifiantes, là où d’autres restent politiquement
corrects…