Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?

C'est donc ça, la comédie qui cartonne ? Le gentil film antiraciste qui parvient aussi à faire rire ?
Au vu des critiques et des conseils divers, je me suis laissé tenter. Ce n'est pas une daube tendance Babysitting, il y a tout de même un peu de tenue, mais de là à attirer plus de cinq millions de spectateurs, c'est un peu incompréhensible, ou bien déprimant.
Clavier serait apaisé, et ne tirerait pas toute la couverture à lui ? Il a un peu vieilli et fait donc un peu moins le guignol, mais c'est encore lui, avec ses tirades qui partent vers l'aigu, son air toujours un peu fâché pour ressembler à De Funès, en ne restant toujours qu'une vague imitation (et je ne suis pas un inconditionnel de De Funès…). Chantal Lauby est bien plus drôle mais par rapport aux autres, elle n'a pas de mal. Ceux et celles qui jouent les gendres et les filles font correctement leur boulot, mais franchement, faire les potiches pour les filles, ça n'est pas très compliqué (les a-t-on choisies pour leur plastique ? Frédérique Bel est pourtant capable de fantaisie…ici, rien !) et pour les garçons, jouer ceux qui s'engueulent pour un oui ou pour un non, avec des bordées de jurons et des grandes gesticulations, ça ne semble pas non plus mériter une quelconque ovation.
L'histoire serait une façon de dynamiter quelques clichés sur l'intolérance ? Elle fait surtout beaucoup de caresses dans le sens du poil. Les blagues à deux balles à tendance xénophobe ou communautariste sont enfilées comme des perles, certaines sont même drôles (un blanc demande à un Africain s'il y a de l'immigration chez lui, oui lui répond l'Africain en lui énumérant une demi-douzaine d'ethnies… Le blanc lui dit, eh bien au moins vous n'avez pas de noirs… Et l'Africain se gondole.) et le public se marre dans la salle. Il y a comme un malaise à les entendre, ces blagues, et les rires qui vont avec. Je ne sais plus qui disait qu'on peut rire de tout mais pas avec n'importe qui. Tout le monde prend-il ça au deuxième degré ? Vraiment ? Il y a comme une sorte de dédouanement très malsain à rire ou sourire en public de vannes qui dans un certain contexte, peuvent être extrêmement choquantes et nauséabondes.
Et puis c'est tout de même une comédie labellisée TF1 (à ce propos, avez-vous vu, au cinéma, la pub que cette chaîne de m… se fait ? Les Français font la gueule…et on voit des gens qui rigolent. Les Français sont racistes…et on voit deux paires de pieds de couleurs différentes sous une couette. Les Français sont des perdants…etc. C'est un peu comme lorsque MacDo nous fait croire dans ses campagnes que leur BigMac c'est du bio, ou presque), et comme bon nombre de comédies qui pourraient passer à la télé, tout cela se finit bien, avec réconciliation bien franchouillarde (alcool, bonne bouffe et partie de pêche…et tradition ? au secours…). Cet enrobage final à la guimauve est plutôt gerbant et il y a de quoi penser avec nostalgie à l'humour grinçant et à la dévastation finale de la comédie de Chatiliez "La vie est un long fleuve tranquille", où la différence n'était ni religieuse, ni de couleur de peau, mais sociale.
La dimension sociale est sans doute au final ce qui manque le plus dans le film de Philippe de Chauveron, qui n'est qu'un produit très calibré, tristement classique dans sa structure répétitive, avec quelques scènes drôles tout de même, mais qui ne rattrapent pas la médiocrité de l'ensemble.

Tiens, si, il y a un personnage qui, par moments, laisse planer un doute sur ce qu'il pense, qui peut faire croire à une certaine ambiguïté, qui surprend (c'est le seul, finalement) : le curé, joué par Loïc Legendre. Lui est réjouissant.