Il y a de quoi se croire revenu
au temps des films symboliques de Fassbinder, où le destin
d'une femme était confondu avec celui de l'Allemagne.
Ce Phoenix est lourdement porteur de sens. Cette femme juive qui
revient des camps, que l'on a cru morte et que l'on ne reconnaît
pas, c'est bien évidemment l'Allemagne qui tente de se reconstruire,
chargée de sa culpabilité mais aussi victime de la
barbarie d'une partie d'elle-même, comme la femme trahie par
son propre mari. L'histoire est sans doute un peu trop lourde, un
peu trop chargée de pathos pour qu'elle puisse échapper
à son contexte, exister pour ce qu'elle est, sans l'accumulation
symbolique des éléments historiques. Non pas que cela
que soit intéressant, mais tout ceci est un peu écrasant,
sans finesse. La mise en scène et le jeu des acteurs (particulièrement
Nina Hoss, parfois horripilante avec ses regards humides-mais-dignes-quoique-teintés
d'un-peu-de-colère…) en rajoutent dans le signifiant
sans ambiguïté, dans la pesanteur poisseuse, dans une
théâtralité inutile. Autre petit souci, le couple
Hoss- Zehrfeld a déjà été vu dans "Barbara"
(du même réalisateur) et comme tous les acteurs, ils
jouent leurs rôles avec leurs personnalités, leurs
façons d'être. Il est parfois difficile d'occulter
ce qu'ils étaient dans le précédent film de
Petzold.
La dernière scène, même si on la voit venir
d'assez loin, apporte en toute fin un peu d'émotion, avec
une possibilité de dressage de poils. Elle peut justifier
à elle seule toute la lourdeur précédente,
ou pas.