Le passé *

Asghar Farhadi

L'histoire

Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française, pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de son bref séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille, Lucie. Les efforts d'Ahmad pour tenter d'améliorer cette relation lèveront le voile sur un secret du passé.

Avec

Ali Mosaffa, Bérénice Bejo, Tahar Rahim, Pauline Burlet

Sorti

le 17 mai 2013

La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Le passé n'est pas simple…

 

Après le choc de "une séparation", le nouveau film d'Asghar Farhadi était évidemment très attendu, avec obligatoirement la tentation de la comparaison et autant d'espoirs que de craintes, parce que le film a été tourné en français, parce que le choix d'y faire jouer Bérénice Bejo était un peu étrange, parce que l'histoire ne promettait pas de renouvellement dans les thèmes abordés par le cinéaste…
Au final, il y a des sentiments mêlés : un soulagement… non, en changeant de langue le réalisateur n'a pas perdu sa manière de faire ni son acuité pour mettre en lumière des situations tendues à l'extrême; une légère, oh, très légère déception, au vu du récit, on serait tenté de dire, "tout ça pour ça", ou plutôt, "à cause de ça"; une admiration intacte devant la mise en scène, direction d'acteurs comprise : il y a, dans une grande majorité de scènes, une densité à la limite de l'étouffement, une crédibilité dans la longueur des séquences qu'on ne retrouve dans le cinéma français que chez Kechiche.
Certains y trouveront sûrement matière à s'agacer devant ces personnages qui parlent, parlent, et découpent chaque cheveu en quatre. Mais c'est bien là une des forces de ce cinéma-là : la parole, le pouvoir des mots, l'importance de ce qui est dit, comment cela fait du mal ou du bien, comment on en arrive à douter de l'affirmation selon laquelle les secrets du passé ne doivent pas rester dans le domaine du silence, qu'il faut tout dire… On sent que les personnages mesurent leurs paroles (ou pas) et réfléchissent, pensent, décident, choisissent. Nous en sommes les témoins, nous sommes nous aussi d'une certaine façon pris à partie, et les situations nous interpellent, nous provoquent, nous font réfléchir, revoir nos positions, nous ébranlent nos certitudes. Il n'y a pas de poursuite en voiture, pas de braquage avec des armes, et pas non plus de jolis paysages ou d'éclairages sublimes sur les visages des actrices. Pas non plus d'effets de caméra ou de cadrages étonnants. C'est d'une grande rigueur, presque austère, tout est dans le scénario, les dialogues et le jeu des acteurs. Sur ce plan-là, Bérénice Bejo en surprendra plus d'un, elle s'est coulée dans l'ambiance voulue par le réalisateur, elle n'est pas méconnaissable, mais elle est très étonnante, avec beaucoup de nuances, un jeu intérieur intense, une présence forte. Les deux hommes ne sont pas en reste mais celui qui est le plus crédible, c'est le petit Elyes Aguis (Fouad), incroyable d'énergie dans ses colères, de retenue dans les dialogues qu'il partage avec les adultes.
Le scénario, toutes mesure gardée, semble être le point faible du film. Dans "une séparation", les enjeux étaient de taille, il était aussi question de vérités et de mensonges mais les conséquences étaient à venir et les choix des personnages pesaient sur l'avenir. Ici, on est déjà face à ce qui est arrivé. On revient donc en arrière pour comprendre pourquoi et comment les actions de certains ont engendré des situations dramatiques. Cette construction du récit, comme une enquête, est bien sûr passionnante, mais apporte un aspect un peu figé au présent.
Un autre point gênant est la distribution des responsabilités entre les hommes et les femmes. Ces dernières sont celles par qui le malheur arrive, elles sont montrées comme inconséquentes, vivantes et faisant évoluer les situations mais porteuses de déséquilibre et destructrices, alors que les hommes sont plutôt des sages, tentant de réparer ce que les femmes ont brisé, écoutant et faisant parler… On sent que le réalisateur se projette bien plus dans le personnage d'Ahmad, dont on ne sait pas grand-chose et qui essaye de raccommoder les relations entre les autres personnages (il n'arrête pas, d'ailleurs, de tout réparer dans la maison où il arrive, de la chaîne de vélo à la canalisation bouchée…) que dans celui de Marie qui semble au bord de la dépression, débordée par ses émotions et par les situations qu'elle provoque.
Ce passé-là est tout de même un film puissant, qui résonne longtemps en nous, pour peu qu'on soit sensible aux mots et à tout ce qu'ils déclenchent.

 

Vos commentaires pour ce film

Pas très gaie cette histoire de familles décomposées, ça tourne un peu en rond, l'amour, la famille recomposée, les sentiments, les passions.
Les coups de colère de Bérénice Béjo(marie) sonnent juste.
J’aime Ali Mosaffa (Ahmad), beaucoup de douceur dans son regard,
4 bons points pour les enfants et encore plus pour la jeune ado mal dans sa peau Pauline Burlet (Lucie).
L’ambiance est lourde, cette tragédie ne m'a pas emballée

Dominique P, le 5 juin 2013

 

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