Sandrine Bonnaire
est une fille formidable. Pas de mauvais choix (ou presque) dans sa
filmographie, un côté anti-star assumé, un engagement
politique et social tout à fait respectable, et un film
documentaire bouleversant sur sa sœur autiste, entre rigueur
et émotion.
On peut donc être très impatient de voir son premier
film de fiction, un peu inquiet quant au sujet, propice au mélo,
et pour le choix des acteurs : William Hurt est le père de
la première fille de Sandrine Bonnaire, dont il est séparé
et dans le film, il joue comme par hasard l'ex de l'héroïne…
elle-même incarnée par Alexandra Lamy, habituée
à des rôles bien plus légers que celui-ci.
A la sortie de la projection, on peut se sentir partagé, pas
tout à fait séduit ou convaincu, mais pas non plus atterré…
Cinématographiquement, il y a une belle maîtrise globale,
un sens du "cut" aiguisé : il n'y a pas une seconde
de trop à la fin de chaque plan, le montage est sec, efficace,
donnant beaucoup de sens aux échanges, aux regards, aux non-dits.
Le rythme du film épouse le récit : à la nervosité
du début, sans hésitations, comme le sont les personnages
de la mère et du fils, succède une lenteur inquiétante
et grandissante, calquée sur la dépression du personnage
joué par William Hurt. L'histoire en elle-même paraît
parfois très crédible et verse à d'autres moments
dans le grand n'importe quoi. Mais ce n'est pas le scénario
qui est en cause, on aurait pu croire à quelque chose d'encore
plus tordu ou insensé, si les acteurs parvenaient à
nous emporter. Mais William Hurt est un bloc de douleur impénétrable,
sans beaucoup de nuances. En face de lui, Alexandra Lamy fait ce qu'elle
peut, on a parfois l'impression d'y voir Sandrine Bonnaire elle-même,
on imagine la réalisatrice à sa place, lui montrant
comment elle doit jouer, et sans doute l'aurait-elle mieux fait…
On voit son jeu en deux ou trois occasions et cela est un peu gênant
pour l'existence du personnage.
Et l'enfant, dans tout ça ? Exactement à l'unisson de
l'entreprise. Parfois très juste, autant dans son jeu que dans
ce qu'il a à dire, et parfois pas du tout crédible,
avec des réparties d'adulte et une maturité déplacée.
Ce n'est donc pas tout à fait le film formidable qu'on est
en droit d'attendre d'une personne aussi riche émotionnellement
qu'est Sandrine Bonnaire, mais sa prochaine œuvre le sera, très
certainement…
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