Comment va Desplechin ? Ou plutôt,
comment va son cinéma ? Difficile de répondre après
la vision de cette fratrie, tant elle ressemble à quelque
chose de connu, comme si le réalisateur avait eu peur de
prendre des risques, de se perdre.
La famille dont il est question est un copié-collé
très (trop ?) fidèle de celle d'un
conte de Noël, des parents au seuil de leur disparition,
une fratrie déchirée, un milieu intello, des rapports
compliqués, la haine et l'amour jamais très éloignés,
des rires et des pleurs, une communication exacerbée...
Desplechin déroule un récit savamment entrelardé
de quelques flash-backs, pour raconter, sans l'expliquer, la détestation
entre un frère et une sœur. Il y avait déjà
cela dans un conte de Noël, entre Elizabeth et Henri (Consigny
et Amalric). Ici, ce sont Alice et Louis qui ne peuvent pas se voir,
et pour souligner la correspondance, les fiancées d'Henri
et de Louis portent le même nom. On pourrait multiplier tous
les parallèles entre les deux films, le neveu fragile, l'ami
de la famille amoureux de la sœur, le prénom du père,
l'enfant mort...
Mais autant le conte s'intéressait à tous
les personnages, passant de l'un à l'autre avec une maîtrise
hallucinante, faisant naître un portrait de groupe magnifique,
drôle et cruel, autant cette dernière œuvre de
Desplechin se concentre sur le frère et la sœur, ne
faisant qu'effleurer les autres (et pourtant, il y avait une belle
esquisse, avec l'admiratrice roumaine d'Alice). Cotillard et Poupaud
sont parfaits, mais ils occupent tout l'espace, monopolisant l'attention.
On frôle la lassitude, on attend la réconciliation,
aucune vraie surprise ne vient estomaquer le spectateur. Les choses
sont attendues, autant dans le récit que dans la réalisation.
Frère et sœur n'est finalement qu'une variante
d'un conte de Noël, une variante sans éclat,
pas désagréable mais presque un peu trop sage...