Les Chatouilles, c'est
d'abord un spectacle,
un monologue autant dansé que joué, où les
mots ont une grande force, où la comédie permet à
Andréa Bescond de raconter le cauchemar de son enfance, violée
régulièrement par un "ami" de la famille.
L'auteure, interprète, danseuse et comédienne faisait
vivre une multitude de personnages, elle y compris, sur une scène
de théâtre. Seul accessoire, une chaise. Aucun décor,
un costume unique (Tee-shirt et jean) d'un bout à l'autre
de l'heure et demie qui tenait en haleine une salle entière,
debout et en larmes au moment du salut.
Les Chatouilles, c'est maintenant un film, qui comme le
spectacle est mis en scène par son interprète principale
et par Eric Métayer. Personne ne pourra dire que cela n'a
pas été voulu par Andréa Bescond. Mais la réception
d'un tel film lorsqu'on a déjà vu le spectacle n'a
sans doute rien à voir avec une première vision de
l'histoire et des différents personnages. Il y a quelques
variantes, par exemple le père prenant ici, dans le film,
beaucoup plus de place. Mais la structure est semblable, prenant
appui sur les séances chez une psychanalyste, un peu dépassée
au début… Bien sûr, la différence la plus
flagrante tient dans l'interprétation de tous les personnages,
au théâtre tous incarnés par Andréa Bescond
d'une manière formidable, de la prof de danse à l'accent
méridional (ici, Ariane Ascaride, très bien mais du
coup sans surprise) à l'épouvantable mère qui
cherche à minimiser tout ce qui est arrivé (sur scène,
Andréa Bescond parvenait à la rendre drôle malgré
l'horreur de ses réactions, dans le film Karin Viard est
juste à baffer, peut-être manquant un peu de nuances),
en passant par le pote de la cité (là, presque plus
crédible au cinéma qu'au théâtre) et
le violeur (Deladonchamps à l'écran, parvenant à
rendre compte du mélange de douceur et de violence, chapeau
l'acteur).
Ceux qui découvriront le film sans être passés
par le théâtre seront probablement séduits par
cette façon souvent drôle de raconter une histoire
sordide, ceux qui ont pu admirer le spectacle sur scène ne
pourront que constater la puissance d'évocation d'Andréa
Bescond en faisant appel à leur mémoire.