Il y a ceux qui voient le monde
comme il va, qui s'étranglent et qui décident, au
risque de l'instrumentalisation (comme disent ceux qui réfléchissent
plus loin que l'écran), d'en faire une comédie qui
pourrait bien servir à quelque chose. Cela donne "Merci
patron".
Il y a ceux, pas si éloignés des premiers cités
en terme de culture et de milieu social, qui se posent des questions
sur le monde comme il va, et qui replongent très vite dans
leur nombril, parce qu'au moins, ça, ils connaissent. Cela
donne cet Avenir, une exploration assez fouillée d'un personnage
qui pourrait être Isabelle Huppert, tant on a l'impression
qu'elle ne joue pas. On lui a simplement demandé de venir
et d'être elle-même, ce qu'elle fait très bien
(au fond, ça n'est pas si facile, d'être soi-même,
chapeau alors). C'est une femme qui se pose des questions, sur sa
vie et sur celle des autres mais surtout sur la sienne. On suit
avec intérêt ses hésitations, ses doutes, ses
allers et retours entre Paris et la campagne, entre sa famille et
ses amis (enfin, ceux dont on imagine qu'ils pourraient être
ses amis), ses soucis de boulot (hum, ça n'a pas l'air trop
compliqué, d'être prof de philo dans un lycée
où les classes n'ont qu'une petite quinzaine d'élèves
et écoutent religieusement en posant parfois une question
qui prouve qu'ils comprennent ce dont il s'agit) (mais passons).
Et puis, merde, merde, bordel de merde ! Qu'est-ce que c'est que
ces gens qui planent à deux mille, qui n'ont aucune ouverture
sur le monde qui les entoure, là-bas, au delà de leur
petit cercle d'initiés ayant lu des bouquins dont la quasi
totalité de la population ne comprend même pas le titre
? Ils ont le droit d'être intelligents, ils en ont même
le devoir, les intellectuels sont indispensables à toute
société libre et démocratique, mais qu'ils
se sortent de temps à autre le doigt du cul ! Je ne parle
pas seulement des personnages décrits, à qui on donnerait
bien quelques baffes, tous autant qu'ils sont, je parle (surtout)
de cette réalisatrice qui film après film est encensée
par la critique parce qu'elle ne fait aucune vague dans l'océan
des certitudes culturellement correctes. Il n'y a pas une idée
de cinéma, il n'y a aucune surprise, tout est plat, descriptif,
redondant, sans rythme, sans contraste, même pas mal joué,
juste pas joué.
C'est donc ça, notre élite intellectuelle ? C'est
désespérant, c'est nul, c'est assez immonde et représentatif
du mépris glacé dans lequel sont tombés un
certain nombre d'artistes (?) qui ne prennent plus aucun risque,
ni artistique, ni politique. Quand on voit, par exemple, ce qu'est
capable de faire Deneuve dans ses choix de films, on se dit qu'on
peut, à tout âge, innover, chercher, se tromper, s'investir…