Jia Zhang-ke est considéré
par beaucoup comme un très grand, et même le plus grand
réalisateur chinois contemporain. Il est possible de s'interroger,
de douter d'une telle affirmation.
Mais il se trouve que la toute dernière scène de ces
"montagnes qui bougent" (un peu plus près du titre
original…) est d'une émotion terrible. Elle peut vous
terrasser, et vous laisser sans voix pendant un bon moment. On pourrait
presque dire que tout ce qui précède est destiné
à préparer ces dernières images. Et pourtant,
elles sont d'une très grande simplicité, et n'ont
aucun sens hors contexte. Ce n'est pas un morceau de bravoure, c'est
juste une illustration du temps qui passe, qui ne reviendra plus,
un concentré de nostalgie pendant une ou deux minutes. Pas
d'effets spéciaux, pas de figurants, un décor nu,
une musique insipide, presque rien et pourtant tout est là.
Le sens de la vie, les regrets, les souvenirs heureux, l'impression
d'avoir tout perdu, une tristesse infinie et puis l'envie de vivre,
encore, malgré tout. Il est des films qui se rattrapent avec
leur dernière scène, celui-ci en est un exemple presque
caricatural. Parce qu'avant, il y a pas mal d'ennui, de l'indifférence
pour les personnages, des affèteries de mise en scène
incompréhensibles, un récit boursoufflé…
Un avion s'écrase sans que l'on comprenne ni les raisons,
ni les conséquences. On subit des fêtes plus ou moins
traditionnelles, avec une caméra tremblotante, hésitante,
mais pourquoi donc ? L'héroïne fait un choix crucial
entre deux hommes mais rien n'est montré sur les motivations
qui emportent la décision. L'écran s'agrandit, passant
d'un format presque carré au cinémascope et cela paraît
téléphoné et sans véritable enjeu (au
contraire de ce que faisait Xavier Dolan dans Mommy…).
L'histoire ou plutôt les histoires pour être plus exact,
sont-elles une allégorie de ce qui se passe en Chine de nos
jours, tiraillée entre les traditions et la modernité
? Tout cela reste un peu flou, souvent ennuyeux. Heureusement, plus
le film avance, plus les personnages deviennent attachants, et l'interprétation,
au début pataude et très attendue, gagne en nuances
et perd de sa fadeur initiale…
Ce n'est donc rien de dire que tout cela paraît très
long, parfois interminable, mais que tout arrive à qui sait
attendre.
Mais il faut attendre longtemps…