71, c'est l'année 1971,
à Belfast, où Catholiques et Protestants s'étripent.
Mais le film, lui, ne raconte qu'une nuit passée dans la
ville en furie par un jeune soldat anglais, qu'on a envoyé
avec sa garnison pour "protéger les populations"
et qui se retrouve seul dans ce chaos, tel un morceau de viande
que se disputeraient des chiens affamés. Deux récits
en un, censés se compléter , et qui au final se font
un peu de l'ombre (même de nuit !) l'un par rapport à
l'autre. Le premier point de vue, le plus prenant, est celui du
soldat anglais, qui cherche à sauver sa peau et qui ne comprend
rien à ce qui lui arrive, qui sont ses alliés et ses
ennemis… Cette fuite qui ne cesse jamais a un aspect jeu vidéo,
et aurait sans doute suffi à tenir le spectateur en haleine,
un peu comme dans l'incroyable "Essential
Killing", où un homme est traqué sans que
l'on sache par qui, et pour quelles raisons…
Par dessus cette poursuite, ou plutôt en parallèle,
le spectateur découvre les coulisses, ce qui se trame dans
les différentes parties en jeu : les catholiques résistants
(?), les protestants radicaux, l'armée anglaise, les infiltrés,
les habitants qui aimeraient sans doute n'en avoir rien à
faire mais qui sont obligés de choisir leur camp… et
tout ceci tourne à la lutte de pouvoirs bien plus qu'à
la guerre de religions… ça n'est même pas politique,
c'est juste Clochemerle en plus sanglant, c'est la Corse en moins
ensoleillé, c'est Bagdad ou Beyrouth sans les mosquées,
ce sont des morts à n'en plus finir et l'origine du conflit
(des conflits) se perd dans un sombre passé oublié.
Ici, les ennemis de tes ennemis ne sont pas obligatoirement tes
amis, de même que les amis des ennemis des voisins des amis
des cousins de tes ennemis… vous suivez ? moi non plus, et
cette volonté de renvoyer tout le monde dos à dos
question responsabilités, de ne pas faire œuvre historique,
de ne choisir comme seul point de vue de cet aspect du récit
que celui d'un éventuel observateur dégoûté
de ce qui se passe, cette volonté affadit l'ensemble. La
fin tendrait à donner raison à ceux qui laissent les
enragés s'entretuer en se lavant les mains et en disant,
ceci ne me regarde pas. Morale douteuse, non ?
