Cet ensemble de scènes est saisissant, avec des dialogues et une façon de les jouer absolument crus, sans fards, résolument naturels. La caméra fixe, insistante, donne l’impression d’être là, au coeur des échanges. Et ceux-ci font mal, ils abordent frontalement les difficultés d’exister au sein d’un couple. C’est pathétique, d’un humour cruel, forcément cruel, tous les personnages sont plongés dans leurs contradictions, les mensonges, les doutes.
On a rarement vu au cinéma (mais est-ce vraiment du cinéma ?) posées de façon si prégnante, les questions autour du désir et de l’amour et plus encore de leurs contraires ou de leur absence. Le désamour est au centre de toutes les scènes, il est comme un trou noir attirant toutes les velléités de tendresse, et ce qui était au départ sûrement un bel exercice de style se révèle d’une justesse à pleurer, d’une profondeur insoutenable.
Cependant, ce qui fait la force du film, cette vérité-là, dessine aussi ses propres limites : est-on vraiment dans une fiction, respecte-t-on les codes inhérents au cinéma, les notions de personnages, d’action, de distance nécessaire pour que le spectateur puisse se sentir face à un “spectacle” ? Oui et non. Il s’agit bien d’une fiction, avec des personnages, joués par des comédiens hallucinants, et l’action évoquée se situe hors cadre, dans les ellipses temporelles; mais il n’y a pas de distance, pas d’élévation possible pour le spectateur, prisonnier du déchirement de ces couples. Et c’est cette absence de distance qui pourrait choquer, bien plus que la très pauvre qualité de l’image, un éclairage réduit au strict nécessaire, des acteurs très loin de l’idée dont on se fait des stars de cinéma.
Au final, une expérience formidablement intéressante, peut-être à ne pas voir en couple...