Les films roumains récents distribués en France donnent tous la même vision de ce pays : triste, incapable de se réjouir de sa Révolution, et fatigué, très fatigué. Comme si le renversement du régime communiste n’avait servi à rien. La mort de Dante Lazarescu montrait le manque criant de solidarité, l’évaporation de la chaleur humaine. Comment j’ai fêté la fin du monde, dans un registre tout de même plus gai, présentait des personnages ayant beaucoup de mal à tourner la page, marqués par une sorte de fatalité.
Celui ci est le plus drôle des trois, et pourtant terriblement mélancolique. Les trois personnages sont pitoyables et à force de se prendre au sérieux, deviennent des clowns lugubres et loufoques à la fois.
Le présentateur tente d’élever le débat avec des allusions philosophiques, mais revient sans cesse à sa question complètement théorique : le soulèvement populaire dans la petite ville a-t-il eu lieu avant ou après la diffusion à la télévision nationale de la destitution de Ceausescu...
Le petit grand-père, invité de dernière minute, ignoré du présentateur, passe son temps à fabriquer des bateaux en papier et lorsqu’on lui donne enfin la parole, il donne une vision tout à fait anecdotique de sa révolution.
L’autre invité, professeur et alcoolique, prétend s’être révolté avant tout le monde, ce que les téléspectateurs contestent en téléphonant à l’émission.
Avec un sens du cadrage très pointu, un montage parfaitement maîtrisé pour donner une impression de fausse lenteur, un refus du pathos, le réalisateur signe là une oeuvre très originale, subtile, politique et sociale à l’origine, et finalement poétique.