Les romans me
tombent des mains, ces derniers temps. Rien ne me retient, ni le
style, ni les histoires, je suis toujours à penser à
autre chose. Depuis Au revoir là-haut de Pierre
Lemaitre (2013 !), rien ne m'avait vraiment séduit. Ou alors
j'ai oublié ?
J'ai refermé il y a quelques jours Tous les hommes n'habitent
pas le monde de la même façon, de Jean-Paul Dubois,
avec le sentiment que ça y était, le bonheur de lire
m'était retombé dessus. Pourtant, j'en avais lu, des
romans de cet auteur. Le cas Sneijder, Une vie française,
et d'autres dont j'ai oublié le titre, l'histoire et les
personnages, et s'ils m'avaient scotché ou ennuyé.
Mais là, ce récit m'a happé, dès la
deuxième phrase : Près de la fenêtre je
regarde la nuit et j'écoute le froid. J'ai adoré
les mots de Dubois, leur truculence, les images qu'ils font naître,
l'aspect parfois baroque des descriptions, la crudité et
la majesté, la démesure et l'infime intime. J'ai relu
des passages, comme l'histoire de l'oncle Nathorod, entre les pages
214 et 217, qui a traversé le continent américain
d'ouest en est sur son vieux tracteur, à 15 kilomètres
heure. Tout est drôle et triste, drôle par la dérision
et triste par les pertes colossales que subit Paul Hansen tout au
long de sa vie. Paul Hansen, le personnage principal, est un type
pas forcément étonnant, pas si fou que ça,
mais à qui il arrive des choses pas possibles, qui rencontre
d'autres personnes tellement dingues que ça ne peut exister
que dans la vraie vie. Parce qu'on ne pourrait pas les inventer.
Je ne sais pas où Jean-Paul Dubois a trouvé son inspiration
pour raconter le destin de Paul Hansen, si ce sont des histoires
vraies arrangées, si ce ne sont que des produits de son imagination,
mais moi, ils me touchent ces êtres humains, radicaux dans
leur existence, dans leurs décisions, dans leurs amitiés
et leurs amours. Je vous raconterais ce qu'il se passe dans ce bouquin,
vous trouveriez ça un peu bizarre et sans doute pas très
passionnant. Ce sont les mots et les phrases de l'auteur qui le
rendent unique, foisonnant et délicat. Il faut le lire, je
vous assure. C'est un bonheur.