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On
ne devrait jamais acheter un bouquin dans une maison de la presse
d'une station balnéaire en plein été, en choisissant
celui qui paraît le moins tarte. Mais j'étais en manque,
j'avais lu tous les romans empruntés à la bibliothèque
(ah non, pas tous, "Le Maître et Marguerite", de Boulgakov,
commencé pour la troisième fois, m'a encore laissé
pantois, je ne suis pas arrivé à m'intéresser
à cette atmosphère complètement dingue…oui
je sais, il faut que j'insiste, mais voilà, cet été,
ça n'était pas encore le moment, peut-être cet
hiver) et il restait cinq jours avant de ranger le masque et le tuba
dans la valise.
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Il y avait
donc dans cette maison de la presse, seul endroit où l'on pouvait
trouver des livres à des kilomètres à la ronde,
un bataillon de Stephen King (j'ai avalé des Stephen King jusqu'à
plus soif, finissant par les mélanger… alors j'ai arrêté)
et un tombereau de Kennedy (Douglas, pas JF; Kennedy, c'est un peu
comme le beaujolais nouveau, le premier qu'on lit est très
agréable, le deuxième ressemble au premier mais vraiment
pas mal, le troisième est un mélange des deux premiers
et on se rend compte que finalement, ça n'est pas très
bien écrit, et le quatrième, on va à la fin en
sautant des pages pour passer à autre chose (le rapport avec
le beaujolais nouveau n'est pas lumineux, mais je pense que vous voyez
l'idée générale, non ?)).
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Entre l'horreur fastoche et la psychologie à
deux balles, s'étalaient une dizaine de bouquins en anglais,
ou pour les mômes, ou des classiques (Balzac ou Anatole France
dans la chaleur de l'été, je ne sais pas pourquoi, mais
pour moi, non merci) et puis ce truc, là, dont j'ai déjà
entendu parler, on m'avait même proposé de me le prêter
et puis ça ne s'était pas fait, ça s'appelle
"le cercle littéraire des amateurs d'épluchures
de patates". Titre bizarre mais best-seller. Allons-y pour le
best-seller
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C'est un roman épistolaire (avec des lettres…), essentiellement
entre une femme écrivain en manque d'inspiration et les membres
d'un drôle de cercle littéraire qui s'est créé
sur l'île de Guernesey pendant la guerre, sous l'occupation
allemande. Ah bon, les allemands ont occupé Guernesey ? Eh
oui, et même Jersey. La femme écrivain finit par venir
sur l'île et donne de ses nouvelles à ses amis, ce qui
justifie la suite des lettres.
Bon, autant le dire tout de suite, c'est charmant, écrit avec
une truelle (petite et en argent (anglaise), la truelle, mais truelle
tout de même), et finalement aussi tarte que les autres livres
de la maison de la presse. Les personnages sont définis dès
les trois premières phrases sur chacun d'eux, et ensuite ils
ne changent pas. Juliet, la femme écrivain, est indépendante
mais à la recherche de l'Amour sans le savoir, elle n'est séduite
que par ce qui est authentique et déteste tout ce qui brille.
Le personnage de l'éditeur américain qui la couvre de
fleurs, beau et con à la fois reste beau et con jusqu'au bout,
et elle ne se marie pas avec lui (bon, même si vous ne l'avez
pas lu et que vous en aviez envie, vous verrez, ce que je vous dis
est loin d'être un spoiler, vous l'auriez deviné tout
seul). Par contre, Dawsey, silencieux et digne et timide et courageux
et viril (quand même) et gentil et tout ce qui fait de lui un
authentique fermier cultivé plein de valeurs, est parfait.
Et d'ailleurs, à la fin… Tous les autres sont à
l'identique : la plupart d'entre eux sont des gentils, avec la petite
dose d'originalité qui permet de les distinguer. Il y a même
le bon allemand, prévenant cultivé beau et occupant
malgré lui. Et les méchants, bouh, ils sont très
méchants. Tout ça est épouvantablement prévisible,
politiquement correct jusqu'à l'écoeurement, grave quand
on aborde les sujets graves (mais pas trop), avec une touche d'humour
anglais (on ne s'esclaffe pas, juste de temps à autre un hi
hi hi léger).
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Heureusement, le bouquin qui à première vue ressemble
à un gros pavé, comporte pas mal de lettres de deux
lignes qui prennent toute une page, ça va donc très
vite.
Qu'est-ce que je vais lire maintenant ? Vous n'auriez pas un truc
un peu consistant à me conseiller, déjà ancien
pour que je puisse le trouver en bibliothèque ? "Le Maître
et Marguerite" ? … Vous êtes des comiques, vous.
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