À
l'occasion de ses trente ans, Alice était allée visiter
Paris. Dans le métro, pour avoir l'air d'une Parisienne,
elle lisait debout.
Au même moment, un jeune homme à vélo roulait
vite ; il avait un rendez-vous important pour un travail. En pleine
rue, sa chaîne avait déraillé. Il tenta de la
remettre d'une manière excitée, fébrile, atrocement
angoissé à l'idée d'être en retard. Mais
rien n'y faisait, la chaîne résistait. Il avait les
mains pleines de graisse, tout allait mal. Il avisa la bouche de
métro, s'y précipita à vive allure. C'était
la seule solution pour ne pas être en retard. En descendant
l'escalier, il vit que le métro était à quai.
Il sauta les marches quatre par quatre et se jeta dans le wagon,
in extremis.
Il bouscula alors une jeune femme et fit tomber son livre. Il s'excusa
et se pencha aussitôt pour le ramasser; au moment de lui rendre,
il vit qu'il l'avait taché : " Pardon, je suis désolé…
j'ai les mains sales." Alice lui adressa alors un grand sourire.
C'était le titre du livre qu'elle lisait : Les Mains
sales. Devant la cocasserie de cette scène, il se mit
à sourire aussi. Alice, pleine d'esprit comme toutes les
Alice, répondit alors : " Heureusement que je n'étais
pas en train de lire La Peste."