Il n'y a pas que le cinéma dans la vie !!!

22 avril 2012

 

Christophe Tison est journaliste, écrivain. Il a donc écrit des articles de journaux, et aussi des livres, que je n'ai pas lus. Je ne suis pas sûr que ça me manque, mais son dernier bouquin, en forme d'inventaire des petits travers de notre société, est un ensemble de définitions de mots-valises, inventés par lui-même, et ce bouquin donc, qui s'appelle "Nos vies formidables", m'a fait sourire, et même parfois, rire. Ce qui, pour un livre, est assez rare.
Allez, quelques extraits…


ON-DIRA-QUE
Personnage qui, par peur d'être jugé, s'entoure de telles précautions oratoires qu'il met des heures à dire une chose aussi simple que "d'accord".
"Si tu veux, on dira que je suis une de ces filles qu'on appelle, entre guillemets (geste des guillemets), disons, "romantiques", alors, pour faire court, je crois qu'on peut, OK, comme disent les gens, "se faire un resto" ce soir…"
Avantage : si ce personnage se prend une "veste" (entre guillemets), ce n'est pas très grave puisque ce n'était pas vraiment elle qui parlait, mais "les gens" ou la fameux "on".


COMME-UN-LUNDI
Collègue de bureau déprimant dont on n'a jamais vraiment retenu le prénom, mais qu'on salue en début de semaine d'un conventionnel mais sympathique : "ça va ?", à la cafétéria, et qui répond invariablement : "comme un lundi."
Le lendemain, le véritable COMME-UN-LUNDI se transforme en COMME-UN-MARDI, et ainsi de suite jusqu'au jeudi. Seule variante, le vendredi : "Ben, aujourd'hui, ça va super : on est vendredi !"

0% BAHAMAS
Sentiment paradoxal qui pousse des non-joueurs à rêver secrètement de ce qu'ils feraient de leur fortune s'ils jouaient au loto.


CACTUS PÉDAGOGIQUE
Léger désespoir provoqué par un ado qui vous demande si vous connaissez cette super chanson de Fabrizzio (avec deux z) de la "Nouvelle Star" qui s'appelle "Les cactus".
"ben, pour toi, c'est peut-être de ce Dutronc, mais pour moi, c'est une chanson de Fabrizzio, voilà."


HAPPY NEW SPAM
Joie de recevoir un texto d'un ami vous souhaitant une bonne et heureuse année, puis légère déception en constatant qu'il n'est pas personnalisé et qu'il a été envoyé aux 296 autres numéros de son répertoire.
Vous avez alors l'autorisation de répondre : "Je ne suis pas un numéro ! Je suis un être humain !"


BASKET-VALIUM
Intérêt porté par le ministère de l'Intérieur (en collaboration avec celui de la Jeunesse et des Sports) à ce nouveau sport appelé "basket-ball", seul remède efficace pour résoudre définitivement le problème des cités.
Le BASKET-VALIUM a remplacé le RAP-VALIUM quand on s'est aperçu que, malgré les subventions, le marché du disque ne pouvait pas absorber des millions de jeunes devenus tout à coup rappeurs. (Tend aujourd'hui à être remplacé par le HAND-VALIUM)


BONHEUR MALADE
Moment de paix et de plaisir paradoxal où, en veillant un enfant qui a un peu de fièvre ou une légère grippe, on se sent soudain serein, loin de l'agitation du jour et proche de ce qui est réellement important.

Il y en a même qui parlent de cinéma…


REBEL-SPECTATEUR
Cinéphile militant et antihollywoodien qui aime les films underground, alternatifs et indépendants, non pas à cause de leur qualité, mais seulement parce qu'ils sont underground, alternatifs et indépendants.
Bad Lieutenant et Tarantino avant sa palme d'or, plus tous les films coréens, hongkongais, et ceux qui portent la mention "Sundance Festival".


CINÉ-IMPREGNATOR
Sentiment de puissance idiot mais incontrôlable qui vous poursuit une partie de la soirée, après avoir vu un film d'action ultraviolent dont le titre contient le mot "kill" ou se termine par "tor II".
(Kill Bill, Killing Zoe, Natural Born Killers, Terminator II, Predator II, Michèletor II…)


BEAU-COWBOY-BLUES
Léger sentiment de décalage à la sortie d'un cinéma lorsque l'on retourne à la réalité. Et que l'on s'aperçoit que, forcément, on n'est plus à cheval, et qu'ici le méchant a de bonnes chances de gagner…
Une déception comparable à celle que l'on a, enfant, au pied du sapin, lorsque l'on ouvre la panoplie de Zorro ou de fée, et que l'on s'aperçoit que, contrairement au joli dessin de la pub et de l'emballage, le chapeau de Zorro est en carton bouilli et la robe couleur de lune, en nylon qui gratte.


CINÉ-QUA-NON
Genre de film qu'il est bon d'avoir vus pour séduire une jeune fille ou un jeune homme.
Tout Cassavetes, Pialat, les premiers Godard…


CINÉ-QUA-NON-NON
Films qu'il est bon de critiquer devant une jeune fille ou un jeune homme qu'on veut séduire, pour prouver qu'on les a vus… et qu'on en est revenu.
Tout Cassavetes, Pialat, les premiers Godard…

 

 

 

 

 

Bon, alors, c'est aujourd'hui dimanche, pas vraiment le jour à mettre sa robe blanche (j'en ai pas) (et puis il ne fait pas très chaud). Et c'est le premier tour des élections. Depuis le temps que je vous bassine avec ça… Bon, keskilvote, le al 1 ? Vous vous en foutez, sans doute. Ben pas moi. Je veux dire, bien sûr que je ne me fous pas de ce que je vais voter, je ne vais pas mettre un bulletin au hasard. Non, je veux dire, moi ça ne m'est pas égal de savoir ce que vous, vous votez. Non pas que ça détermine quelqu'un, mais ça fait partie de ses choix importants. Bon, si vous ne votez pas, circulez, l'argument qui dit qu'il n'y a personne qui correspond à vos valeurs ne tient pas. Ou alors présentez-vous. On est bien obligé de voter pour quelqu'un qui se rapproche le plus. C'est pas une déclaration d'amour, ou une demande en mariage, c'est juste un vote.

Alors, voilà, un scoop, je NE vais PAS voter pour le triple A (abruti agité abominable). Je NE vais pas voter NON plus pour la facho de service, ni pour le donneur de leçons qui à force de se dire au centre va disparaître dans son propre nombril. Oui, bon, tout ça vous deviez bien le savoir.
Alors, après la tentation Eva Joly (j'ai adoré quand elle a dit que le 14 juillet, on devrait faire défiler les forces vives de la Nation, et non pas tous ces armuriers avec leurs panoplies de petits soldats névrosés) (euh, sans doute qu'elle ne l'a pas dit exactement comme ça, mais c'est tout comme), après la tentation Mélenchon (j'aime bien son côté "tribun pourfendeur des nantis"), après la tentation Poutou (ben oui, comme tout le monde, j'ai fait le test du monde.fr pour savoir avec quel programme j'étais le plus en accord, et comme tout le monde, c'est Poutou pour qui je devais voter…) (comment ça, pas comme tout le monde ?), après la tentation Cheminade (non, là, j'déconne), je vais voter Hollande.
Pas parce qu'il est corrézien d'adoption (comme moi un moment), pas parce que je lui ai déjà serré la paluche, pas parce qu'il raconte des bonnes blagues, non pas pour tout ça. Je vais voter pour Hollande à cause de Vincent Peillon, son futur ministre de l'Education. Il a une tête à avoir avalé un parapluie et pas vraiment flexible, le parapluie, mais ce qu'il dit sur l'Ecole est de loin le discours le plus intéressant de la campagne électorale. Pas à cause des 60 000 postes promis, mais ce qu'il souhaite à propos des évaluations, des rythmes scolaires et de l'accompagnement des élèves en difficulté. Bon, ce ne sont que des promesses, et on sait à quoi s'en tenir, mais j'ai tout de même l'impression que, question économie, quel que soit le président, on l'a dans l'os et que ce ne sont pas les politiques qui y peuvent quelque chose, en revanche pour ce qui est de l'Education, il y a des leviers possibles, des orientations idéologiques, il y a une véritable différence entre les programmes des candidats. Rendez-vous dans cinq ans, si Hollande et Peillon ont échoué à relancer l'Ecole, il n'y aura plus qu'à changer de métier. Crieur public, par exemple. Ou bien bourrelier. Ou encore, vendeur de glaces et de cookies.

 

 

Oui, j'aime bien les chanteurs à texte et les musiques douces que personne n'écoute, d'accord. Mais j'aime bien ça aussi.Ça a tendance à faire tricoter les guiboles.