Décembre 
        2007 
        
      Rue Santa Fe 
        Carmen Castillo 
        
      Bon sang, comment font-ils 
        les critiques de ciné, pour dire aux gens "allez voir ce film, 
        ne passez pas à côté, c'est beaucoup plus qu'un film, 
        c'est une émotion profonde, une réflexion fine, intelligente 
        et intense, ... un choc. Un film dont on ne sort pas tout à fait 
        comme on y est entré" ? Comment on fait, surtout quant ce 
        n'est pas vraiment un film mais un documentaire. De 2h40. 
         
        Bon, alors voilà. La "Rue Santa Fé", c'est la 
        rue dans laquelle Miguel Enriquez a été assassiné, 
        en 1974, par la junte militaire de Pinochet. Miguel Enriquez, c'était 
        le chef du MIR, Mouvement de la gauche révolutionnaire chilienne, 
        créé en 1965 et qui, après la mort d'Allende, a lutté 
        contre la dictature, jusqu'à sa dissolution dans les années 
        90. 
        L'histoire de cet homme, de ses compagnons, de ce mouvement, est racontée 
        par Carmen Castillo. Elle était sa compagne. Elle a vécu 
        en exil. Elle raconte son engagement, celui de tous ces hommes et de toutes 
        ces femmes qui ont consacré leur vie à ce combat pour la 
        liberté, au Chili, puis en exil, puis à nouveau au Chili, 
        dans la clandestinité et souvent en abandonnant leurs propres enfants 
        dans leur pays d'exil. 
        Ce témoignage est déchirant. C’est un récit 
        en voix off (et quelle voix, ... et quels textes !!!). Carmen Castillo 
        est retournée au Chili pour tourner le film. Elle y retrouve les 
        lieux, les amis, ceux qui ne sont pas morts, les voisins, les témoins 
        ... Tous parlent de leur propre histoire, de leur propre vie, avec gravité, 
        avec émotion et pudeur, avec douleur, avec humour parfois, avec 
        recul et toujours avec une dignité admirable, bouleversante. 
         
        Et puis, au delà de l'émotion (qui est profonde sans être 
        forcée), il y a au coeur même de ce film (tel que je l'ai 
        ressenti), une réflexion sur l'engagement, le sens même de 
        l'engagement, son sens collectif et son sens personnel. Ses limites. Ou 
        pas. Une réflexion, pas une quelconque vérité. Qu'aurions-nous 
        fait ? 
         
        La "Rue Santa Fé" parle de l'essentiel, de ce que l'homme 
        a de meilleur et de pire. Il en parle bien. C'est bien tourné. 
        Rien ne tombe dans la facilité. On en sort plus riche. Je crois. 
        Ne passez pas à côté. 
         
        Thierry D.  
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