Katherine est mariée contre
son gré. Elle hésite lorsqu'elle doit chanter lors
de la cérémonie, elle semble regarder son époux
avec incompréhension. Puis elle affronte la réalité.
Pas de discours, des dialogues réduits au minimum, des ordres
lancés, des regards durs qui tiennent tête, pas une
once de psychologie, rien que des faits, même microscopiques,
comme cette femme qui s'endort. On ne sait donc rien d'elle, rien
de sa famille ni de ses envies, de ses rêves, de ses peurs.
Au spectateur de lui créer une vie d'avant. Ou pas. Le film
peut se recevoir tel quel, avec pour seul contexte une demeure bourgeoise
au dix-neuvième siècle, en pleine campagne, où
une jeune épousée se morfond, en attendant les hommes
: son mari, son beau-père, et les employés, dont un
jeune palefrenier.
Elle est à la fois Madame Bovary, la jeune femme de Barbe
Bleue, Lady Chatterley et Lady Macbeth (le film est d'ailleurs une
adaptation du livre "Lady Macbeth du district de Mtsensk",
écrit par Nikolaï Leskov). L'histoire réserve
quelques surprises, à moins qu'on ait compris rapidement
la radicalité de Katherine.
La mise en scène se met à la hauteur du personnage,
toute en contrastes. A la fois simple, sobre, dépouillée
mais aussi passionnée, furieuse, tragique. C'est un cinéma
qui fait la part belle aux images, particulièrement travaillées,
composées comme des tableaux ou des motifs géométriques
que le réalisateur se plait à déformer. Et
malgré la splendeur visuelle, le film est d'une grande sécheresse,
sans musique (sauf en deux ou trois occasions, plus une plainte
menaçante qu'une véritable musique), avec beaucoup
de plans fixes au caractère hypnotisant. L'actrice principale,
Florence Pugh, apporte quelque chose de véritablement atypique,
elle est animale, féminine, monstrueuse…