Mais pourquoi donc un catcheur
? Ceux et celles n’ayant que difficilement supporté les
coups et le sang dans Million Dollar baby sont invités à
rester chez eux, ce "wrestler" est d’une violence
effroyable, parfois sadique, franchissant allègrement les limites
de l’immonde, lorsque deux combattants parsèment la scène
(pardon, le ring) de fils barbelés, de verres brisés
et autres objets tranchants, sans oublier de se perforer la peau à
grand renfort d’agrafeuses ! Immonde, on vous l’aura dit.
Pourtant, ce portrait de has been détruit encore plus de l’intérieur
que de l’extérieur est assez beau : l’émotion
déborde lors des instants d’apaisement, comme cette sorte
de danse esquissée dans un hangar désert entre le père
et sa fille, ou ces chaleureux moments d’intimité et
de complicité entre Mickey Rourke et Marisa Tomei, qui font
croire qu’une autre vie est possible.
La mise en scène épouse presque exclusivement le point
de vue du catcheur, imposant la masse du corps comme une évidence,
un paquet de muscles fatigués et meurtris, une machine en bout
de course… L’acteur est bien sûr énorme,
à tous points de vue, parvenant à faire ressentir l’immense
solitude du personnage malgré la célébrité.
L’histoire est sans surprises, elle est celle de toutes les
gloires déchues, elle pourrait être celle d’un
chanteur asthmatique, d’un écrivain perdu, d’un
cycliste fini, mais c’est bien de catch dont il s’agit,
et ce n’est pas qu’un décor, le film a des aspects
documentaires sur ce spectacle (en aucun cas il ne s’agit de
sport), les grandes lignes de chaque combat pré-établies,
parfois jusque dans les moindres détails. La violence est inéluctable,
elle est même obligatoire, et ça fait mal, très
mal. Pourquoi donc un catcheur ?