L'Adamant, c'est une péniche
sur la Seine, et surtout un lieu d'accueil, un centre de jour pour
des adultes "souffrant de troubles psychiques". En langage
non édulcoré, des fous. Et lorsque les fous ont la
parole, même sous médocs, ça peut déménager.
On passe de la douleur intime, enfouie ou à fleur de peau,
à une forme de lâcher prise joyeux que tout humain
"sain d'esprit" rêverait d'atteindre. Comme dans
tous les films de Philibert, l'aspect documentaire prend la tangente,
ne veut rien démontrer, il effleure ou il creuse, il peut
agacer par son côté libertaire et poétique,
il laisse le spectateur faire son propre raisonnement.
Les personnages, qui ne sont pas considérés comme
des malades ou des patients, nous questionnent terriblement, sur
notre propre dose de folie, sur nos modes de pensée raisonnables,
sur nos façons de communiquer. Eux n'ont plus les codes,
ou ne les ont jamais eus, et lorsqu'on entend leur discours, on
peut se demander de prime abord comment en sont-ils arrivés
là, à quel point ont-ils disjoncté. Et puis,
chemin faisant, au fur et à mesure des séquences,
on relativise, ou non. On perd bon nombre de nos repères.
Le film les fait glisser, chamboule les notions d'essentiel, de
déraison, de lucidité.