Les films "Se souvenir des
belles choses" et "Loin d'elle" traitaient eux aussi
de la maladie d'Alzheimer, précoce ou non. Ils privilégiaient
les relations entre les personnages, et n'étaient sans doute
pas très précis sur l'évolution de la maladie
en elle-même, mais ils avaient tous les deux le mérite
d'avoir derrière la caméra une véritable réalisatrice
(Zabou Breitman pour le premier, Sarah Polley pour le deuxième),
ayant des partis pris sur la façon de conduire le récit.
Dans ce "Still Alice", on suit, de plus en plus assommé
par la dégradation, le parcours d'une femme brillante, prof
de fac en linguistique, et tout est balisé, attendu, du premier
mot oublié à l'hébétude finale. On se
croirait devant un film de commande chargé d'exposer les
ravages de la maladie avant un débat entre scientifiques,
comme au (bon) vieux temps des dossiers de l'écran. Les personnages
secondaires sont complètement sacrifiés, rigidifiés
chacun dans une attitude : le mari n'assumant pas, la fille aînée
éplorée, la cadette bougonnant mais assurant quand
même, le médecin très professionnel…
Et Alice ? Alice n'existe pas tout à fait, c'est surtout
Julianne Moore à la recherche d'un oscar (bingo !), elle
est parfaite, trop parfaite en femme parfaite avant la maladie,
puis déclinant toutes les variations de la douleur, du désespoir,
de l'abattement… C'est tellement impeccable qu'on finit par
s'ennuyer, malgré quelques petites piques d'émotion
qui viennent chatouiller les glandes lacrymales (mais avec la musique
qui va bien et les regards désolés, c'est un peu facile,
non ?) Ça n'est plus "Still Alice", mais "Still
Julianne"…