Eyal est en deuil, il a perdu
son fils. Mais il ne se lamente pas, Eyal. Il fait le goujat (vraiment)
avec des voisins venus lui présenter leurs condoléances
et une salade de concombres (c'est le Shiv'ah, une tradition juive…
euh, pas sûr pour le concombre qu'il fasse partie de la tradition),
il va récupérer une couverture bleue, verte, orange,
rouge, violette et rose dans l'hôpital où son fils
est mort et il emmerde tout le monde avec ça, il ne trouve
pas la couverture mais du shit pour apaiser la douleur, il l'embarque
et se met à fumer avec le fils des voisins avec lesquels
il s'est embrouillé… bref, il déconne, Eyal.
Sa femme, Vicky, le regarde avec un mélange de résignation
et de sidération teinté d'une pointe de tendresse
(et tout ça mêlés, chapeau l'actrice…).
Est-ce un drame, est-ce une comédie ? Ni l'un ni l'autre,
le réalisateur, bien aidé par ses interprètes,
parvient à produire de la matière à rire et
à pleurer exactement en même temps. Et même lorsqu'un
discours funéraire élégiaque et tout bien pesé
pour émouvoir se fait entendre, les images, sans tout à
fait le contredire, sont là pour moduler les larmes, si larmes
il y a. Le film est parsemé de scènes surprenantes,
percutantes, déroutantes, et au final enthousiasmantes parce
que jamais elles ne versent dans le pathos, parce que jamais Eyal
ne devient tout à fait sympathique, convivial et résigné.
Il ne supporte pas la mort de son fils, et son bouleversement s'exprime
par un lâcher-prise qui le libère des conventions.
Tout n'est pas expliqué, tout n'est pas mis en lumière,
comme dans la vie, comme dans la mort. C'est le premier film d'Asaph
Polonsky, c'est un bijou qui ressemble à de la pacotille
mais qui renferme une brillance sombre, incroyablement vivante pour
le récit d'un deuil.