Belle lumière, beaux costumes,
beaux silences, pas mal le Lindon qui s'interroge, qui tranche,
qui s'obstine, bref, qui fait l'artiste… Dommage qu'une grande
partie des dialogues soit incompréhensible. La faute à
qui ? L'acteur et sa barbe ? Le preneur de son ? la post-synchro
? Cela n'a sans doute pas beaucoup d'importance mais il se trouve
qu'il y a là une faiblesse terrible, que soit personne n'a
vue et c'est tout de même incroyable pour une telle production,
ou bien Jacques Doillon a jugé que cela n'était pas
préjudiciable, ce qui, au vu de ses œuvres précédentes,
ne serait finalement pas si incroyable.
Que reste-t-il ? Des séances de création, parfois
intéressantes (tiens, Rodin est un sculpteur qui pratique
plutôt le modelage, tiens, les drapés, ce sont des
vrais tissus, tiens Rodin dessine, aussi…), parfois longues
et répétitives. Des séances de séduction,
d'amour et d'engueulades entre Rodin et Camille Claudel, comme dans
n'importe quel Doillon, plutôt moins hystériques que
la moyenne et c'est déjà ça. Sauf que, beaucoup
trop souvent, on ne saisit pas très bien les tenants et les
aboutissants de ces conflits, toujours en raison d'un son défectueux.
(oui, je sais, je deviens sourd, mais il y a de trop nombreux témoignages
de spectateurs qui sont loin d'avoir tout entendu pour que seule
ma surdité naissante soit en cause ;-) )
Les deux personnages, Rodin et Camille Claudel, ne font naître
aucune émotion. L'un est assez vil avec les femmes, l'autre
passe pour une jeune femme un peu fade, un peu capricieuse, loin
de l'image tourmentée qu'avait laissé le film de Bruno
Nuytten avec Isabelle Adjani.
On voit passer Monet, Hugo, Cézanne, Rilke, Mirbeau, Pompon,
et tous ceux-là pourquoi ? Qu'a voulu faire Doillon ? Le
biopic est lapidaire et mal structuré, la réflexion
sur l'art et l'artiste absolument pas neuve, la chronique amoureuse
attendue et vraiment pas prenante. Le personnage de Rose, la femme
de Rodin, est le seul, au final, à intriguer, avec sa fausse
patience exaspérée. Mais Séverine Caneele,
qui l'interprète, fait un peu peur. Etait-il nécessaire
d'en faire une telle ogresse, si repoussante ?
Rodin est reparti du festival de Cannes bredouille. Cela
n'est pas tout à fait surprenant…