Adapté d’un roman
de McEwan qui avait marqué les esprits lors de sa parution,
le film semble chercher sa propre expression d’un bout à
l’autre des deux longues heures de projection. Le changement
de titre entre le livre et le film est représentatif de ce
loupé : “Reviens-moi” sonne comme un best-seller
dégoulinant, là où “Expiation” laissait
percer quelque chose de profond et très noir.
On se croirait par instants dans une comédie romantique, rythmée
de façon très irritante par une bande son envahissante,
puis au coeur d’une tragédie littéraire lourde
dans son propos mais n’arrachant pas une seule larme, sans oublier
l’échappée poétique et délirante
sur la fuite des anglais de Dunkerque en juin 40.
Le récit peine à imposer ses personnages, à s’y
intéresser vraiment. On ne saisit pas, au fond, les raisons
qui poussent l’adolescente écervelée à
commettre sa dénonciation mensongère, et le couple des
amants maudits n’est finalement pas très attachant. La
multiplicité (voulue) des points de vue aurait été
intéressante, mais elle ne fonctionne pas.
Il reste tout de même deux
scènes fulgurantes, celle où Keira Knightley sort de
l’eau, courte-vêtue, furieusement désirable, et
le très étonnant plan-séquence sur la plage,
naviguant entre les soldats, pour finir devant un extrait de Quai
des brumes : il y a là, dans ce tourbillon fantasmatique, quelque
chose de Fellini. Mais cette bouffée de créativité
ressemble à un morceau de bravoure au milieu d’une chose
étrangement creuse.