Ah, le petit bijou… Vraie
fausse douceur, engrenage ancré dans le réel et traité
par instants de façon très littéraire. Ce ravissement
à multiples sens n'en finit pas de révéler
ses atouts, même à l'issue de la projection. C'est
un thriller psychologique qui fonctionne sur plusieurs suspenses
en parallèles. Les trois personnages principaux ont chacun
leurs raisons de mentir, de se mentir à eux-mêmes,
d'être inquiets des agissements des autres mais en attendent
énormément : la relation d'amitié entre Lydia
et Salomé est indestructible mais peut exploser à
tout moment; et l'amour naissant entre Milos et Lydia n'est basé
sur rien, il est extrêmement fragile, mais peut renverser
des certitudes pour l'un comme pour l'autre.
Le cheminement de Lydia vers un passage à l'acte effarant
a tout d'un engrenage de quiproquos, de mensonges par omission encouragés
par la maladresse de ceux qui l'entourent ou simplement par un manque
d'écoute. Mais le récit laisse supposer que la solitude
de la jeune femme y est pour beaucoup. Est-elle manipulatrice ou
victime de ses manques affectifs ? La réalisatrice laisse
le spectateur juger.
C'est un premier long métrage pour Iris Kaltenbäck,
mais sa mise en scène est déjà d'une maîtrise
impressionnante. Sans artifices ou effets de mode, elle insuffle
au film un rythme qui ne lâche pas le spectateur, et s'autorise
des instants de contemplation, bien aidée, il faut le dire,
par une actrice en état de grâce : Hafsia Herzi donne
beaucoup d'intensité et de couleurs à son personnage,
elle est tour à tour rayonnante ou sombre, déterminée
ou hésitante, elle impose une présence mystérieuse
et atypique. Chapeau les artistes.