Ah, ils sont
trop forts, ces ricains ! Avec leur bon sens commercial, en pleine
guerre froide, ils parviennent à organiser un échange
d'espions tout à leur avantage, en refourguant un vieil agent
secret russe en bout de course contre un pilote d'avion jeune et
fringant avec toutes ses dents bien blanches et en prime un étudiant
plein d'avenir qui, lorsqu'il aura retrouvé sa jolie fiancée,
lui fera une ribambelle de petits patriotes… Et comme si cela
ne suffisait pas, ce n'est même pas une bande de fonctionnaires
d'état dévoués qui réalise ce prodige,
mais un homme tout seul, n'ayant que sa bonne volonté et
son savoir-faire. Ainsi Spielberg en s'inspirant d'une bonne vieille
"histoire vraie", fait d'une pierre deux coups, tenir
en haleine son spectateur accro à son talent de conteur,
et célébrer l'individualisme libéral de son
héros qui réunit pas mal de qualités du self-made-man
amerloque de base. Tout cela sans aucun coup de feu, en douceur
et avec quelques petites pointes d'humour. En plus, tout le monde
est sympa, même l'espion russe, qui fait ami-ami avec le Superman
du libre échange. Trop fort, le Steven !
Mais au final, tout cela est tellement prévisible et tellement
puant d'américanisme primaire que le film peine à
passionner. Une bien belle histoire avec de bien beaux personnages,
filmée classiquement, avec efficacité. On peut même
écraser sa petite larme à la fin en se disant qu'on
ne se fera pas avoir la fois prochaine.