Sur un sujet somme toute assez
banal (une femme quitte son compagnon et ses enfants), Nicolas Birkenstock
parvient à emporter le spectateur dans son univers très
personnel. Il y a beaucoup de douceur dans la façon de présenter
les lieux, les objets, la nature… les visages aussi. La caméra
semble caresser ce qu'elle montre et pourtant le film n'est pas
mou, rempli de couleurs, de nuances. On sent le plaisir du réalisateur
à filmer la maison, le jardin, les corps en mouvement. Il
n'est pas rare, particulièrement dans un premier long métrage,
que la forme soit aussi soignée, mais il y a là une
belle maîtrise et en même temps un sentiment de liberté,
cet homme a un style cinématographique et ça n'est
pas si courant, par les temps qui courent. Tout cela serait assez
vain si le récit restait en deçà de la qualité
formelle. Mais les personnages du père et de la fille, confrontés
à une situation familiale déstabilisante, ne réagissent
pas exactement comme tout un chacun. Leurs relations, entre eux
et avec le reste du monde qui les entoure, questionnent le spectateur,
déroutent, provoquent l'émotion. On y croit, à
ces deux-là. Mis à part deux ou trois scènes
qui paraissent un peu forcées par rapport au reste, Philippe
Torreton et Armande Boulanger (une formidable découverte
!) incarnent de vraies personnes, leur charme fonctionne tout seul
et il se dit beaucoup de choses essentielles, pas seulement avec
les mots, mais avec les intonations, les postures. Torreton est
avant tout un acteur de théâtre et ce père faussement
bourru, follement aimant, on y croit aussi parce que tout son corps
le joue. Pour la jeune Armande Boulanger, c'est d'une certaine façon
plus facile, puisqu'on la découvre et que tout ce qu'elle
fait est nouveau pour nous. Mais quelque chose en elle fait qu'on
peut penser qu'elle ne s'arrêtera pas là.
Le film se clôt sur une scène très étonnante,
pas très réaliste, mais pour le coup vraiment surprenante.
Impossible de ne pas avoir le sourire aux lèvres. Vivement
le prochain film de Nicolas Birkenstock !