Bien sûr, le réalisateur
est de parti pris, il construit un montage à charge contre
les violences policières, mais au moins cela change des informations
“officielles” des journaux télévisés.
Bien sûr, le film ne changera aucune conscience, les spectateurs
potentiels pour ce type de documentaire sont déjà
tous à peu près convaincus, et au final il n'y a rien
qu'on ne sache déjà, mais cela permet au moins de
rafraîchir la mémoire et de (se) rendre compte que
les violences policières ne sont pas des cas isolés,
loin de là.
Tout ce qu'on a pu voir sur les réseaux sociaux est montré
sur grand écran, les assauts inconsidérés,
les scènes de guérilla, les tirs à l'aveugle…qui
rendent aveugles, les comportements de voyous de la part de ceux
qui sont dans la rue pour "faire régner l'ordre"…
Et c'est impressionnant. Un déferlement qui par son abondance
et par la densité de la violence exercée, semble sortir
d'un autre pays ou d'une autre époque…
Ces vidéos tournées dans leur majorité avec
des Smartphones, sont projetées à plusieurs personnes,
témoins ou acteurs et victimes de ces mêmes scènes,
journalistes, reporters, historiens, juristes, chercheurs, philosophes…
Ces personnes commentent ces images, en débâtent, échangent
leurs réflexions. Ce recul et ces mots posés sur l'émotion
sont forcément intéressants, permettent d'aller plus
loin, d'essayer de comprendre d'où vient cette violence,
comment et pourquoi elle s'abat sur des manifestants.
Mais il y a aussi comme une ébauche d'essai philosophique
et historique sur ce qu'est la violence d'état, la brutalité,
celle qui est portée en toute conscience par des dépositaires
de la force armée légale, commanditée par des
représentants du peuple (en tous cas, élus en tant
que tels) et exercée contre une partie de ce même peuple.
Certains diront, pour protéger une partie du peuple. Certes,
mais un choix est fait par ceux qui nous gouvernent, celui de frapper
les uns pour protéger les biens des autres. Et encore, ce
n'est qu'une interprétation. Qu'est-ce que la démocratie
s'il n'y a pas de contestation ? Pourquoi les forces de l'ordre
agissent-elles toujours en toute impunité ? (la phrase de
Macron estimant que la violence policière est en quelque
sorte parfaitement légale et légitime est digne d'un
type qui n'a pas sa place en tant que Président de la République
d'un pays libre et démocratique) Pourquoi la police, à
l'origine liée à la cité, est-elle devenue
nationale ? Tant de questions et bien d'autres sont posées,
il faudrait sans doute une centaine d'heures pour bien les traiter,
et il n'y a pas, ici, de représentants du pouvoir en place
(ils ont décliné toutes les invitations, ruinant ainsi
le débat en l'esquivant). On assiste alors au développement
d'idées, sans antagonisme, sur ce que devrait être
une vraie démocratie, et comment la protéger, et pourquoi
depuis quelques années il y a comme un glissement, en France,
vers un régime plus autoritaire. On a parfois l'impression
que les intervenants enfoncent des portes ouvertes ou se situent
à un niveau presque abstrait…
Il n'empêche, le film peut agir comme un outil de prise de
conscience, comme une compilation d'informations introuvables dans
les grands médias et comme un appel à la réflexion
sur la Démocratie. C'est déjà ça.