L'histoire qui est racontée
ici s'inscrit dans la lignée de celles des enfants délaissés
par leurs parents et qui tentent de survivre, en faisant croire
à leur entourage (ou tout au moins aux services sociaux)
qu'ils ne sont pas seuls. Rien de bien nouveau, donc.
S'ajoute tout de même une forte relation entre trois sœurs,
une sororité tumultueuse, faite de beaucoup de rugosités
et de quelques douceurs. Et puis une incursion dans le monde adulte
très étrange, une femme presque enfant, avec qui la
relation est possible parce qu'elle ne se comporte pas comme une
grande personne responsable.
Mais ce qui rend le film précieux et singulier, c'est sa
mise en scène, ses choix de récit, ses méandres
entre poésie et réalité crue. La situation
des trois sœurs n'est pas simple, la réalisatrice ne
fabrique donc pas un film simpliste, au récit linéaire.
Il y a des ellipses, des mystères, des éléments
qui resteront inexpliqués jusqu'au bout… et c'est tant
mieux. Ce cinéma a du style mais n'est pas stylisé
pour autant. Il est tranchant par instants, caressant à d'autres,
il accompagne les personnages sans les rendre lisses. Et les trois
jeunes comédiennes qui incarnent les trois filles sont d'une
crédibilité formidable. Vivantes, mal aimables et
pourtant extrêmement attachantes.