Saoirse Ronan est vraiment une
actrice intéressante. Elle pourrait se tourner vers un cinéma
facile, hollywoodien, commercial. Elle choisit, pour le moment,
des projets plus personnels, plus singuliers. Elle est ici non seulement
le personnage principal, mais aussi la productrice du film dont
le sujet pourrait donner lieu à un itinéraire de renaissance
classique, une histoire où tout serait résolu en fin
de parcours. Le récit ne va pas tout à fait où
on l'attend, mêlant les époques au risque parfois de
se perdre, mettant en lumière toutes les ambiguïtés
et subtilités d'un renoncement aux addictions d'une part,
et d'autre part du bien être que peut procurer une nature
sauvage et hostile. Rona (le prénom n'est pas celui du roman
dont le film est adapté, et semble très proche de
celui de la réalisatrice mais aussi du nom de l'actrice…)
est une jeune femme complexe, aux attentes multiples, entretenant
des relations houleuses avec ses proches. La mise en scène
épouse cette existence chaotique, passant du sombre à
la lumière, au service d'une actrice en état de grâce.
On peut se retrouver parfois comme exclu de ses atermoiements, parfois
complètement en osmose. The Outrun pourrait être
traduit par l'écart. C'est le titre français
du livre. Plus qu'un écart, le film montre comment une jeune
femme peut être en dehors de la vie qui lui est proposée,
comment elle parvient, plus ou moins, à construire un cheminement
personnel salvateur où un cri d'oiseau suivi d'un bref éclat
de rire peut apporter une émotion très intense…