Au vu du sujet, on aurait pu
s'attendre à un récit descriptif, édifiant,
mettant en lumière la période historique, la fin des
années Franco en Espagne, les résistances… La
réalisatrice, pour son premier film, fait un autre choix
en s'attachant presque exclusivement à montrer la souffrance
des femmes confrontées aux aberrations d'une société
dominée par les hommes. Les deux instants où elles
font l'amour, avec leur consentement, sont fugitifs et ne sont présents
dans le récit que par les conséquences qu'ils engendrent.
Ni les situations, ni les personnages ne sont caricaturaux, et on
peut imaginer que cela ait pu se passer à peu près
n'importe où en Europe, il suffirait de faire glisser la
période de quelques décennies.
Tout le film porte en lui une lourdeur dont il ne se détache
jamais. Une lourdeur bien compréhensible, le propos n'a rien
de léger, ni de drôle. Mais les partis pris de mise
en scène renforcent cette pesanteur, la surlignent par des
dispositifs stylisés, presque théâtraux ou chorégraphiques
(l'actrice principale pratique la danse contemporaine). Les accouchements,
l'avortement, les tensions, les rencontres, tout est montré
dans une ambiance un peu étrange, un sentiment d'irréalité
domine, appuyé par les éclairages, les couleurs, le
traitement sonore, le sur-jeu des actrices. Ce procédé
assumé pourrait, devrait tirer l'ensemble vers un aspect
plus artistique, allégorique, universel. Il ne parvient finalement
qu'à plomber le film qui n'est pas sans intérêt,
qui porte en lui une force impressionnante mais implacable, écrasante.