Le jeu de mots du titre occulte
la vérité, ou du moins, la transforme. Anne Gruwez
n’est effectivement pas soumise, très loin de là,
mais elle est bien juge. Une juge d’instruction formidable,
qui analyse, qui tranche, qui n’hésite pas à
engueuler les prévenus sans prendre de gants mais qui peut
aussi les rassurer, compatir à leur malheur, éclater
de rire ou sursauter d’effroi. Entière, radicale, drôle,
piétinant allègrement la sacro-sainte et molle bienveillance
pour emprunter le chemin autrement plus empierré de la sincérité,
en utilisant des mots forts, sans ambiguïté ni faux
semblants. Elle fait drôlement du bien, cette juge. C'est
une authentique résistante à l'uniformité,
aux protocoles absurdes, à l'immobilisme institutionnel.
Le spectateur assiste à son quotidien professionnel, en espérant
que tout cela n'est pas feint et qu'il s'agit bien d'un documentaire.
Le récit revient régulièrement sur une enquête
non élucidée, qui tracasse la juge, mais qui est surtout
prétexte à la rencontre d'autres personnages et aboutit
à l'exhumation d'un suspect : scène surréaliste,
commentaires absolument pas moralement corrects : un vrai petit
bonheur.
Lorsqu'en fin de projection, on quitte Anne Gruwez, sa 2CV, son
humour ravageur, sa bouille ronde et ses regards malicieux, on est
rempli d'une chaleur particulière, on aurait envie que cela
continue encore et encore. C'est bon signe !