Monsieur Nobody est un farceur…
Son nom est une provocation au bon sens, ou un hommage à Sergio
Leone ou bien, encore plus loin, à l’Odyssée de
Homère… Mais il est à craindre que ces références
ne soient que des clins d’œil, des gadgets.
Monsieur Nobody a donc plusieurs vies. Ce n’est pas qu’il
soit un chat, mais c’est plutôt du côté de
sa mémoire défaillante qu’il faut chercher les
raisons des différentes versions de son existence qu’il
se plaît à donner à ceux qui veulent bien l’interviewer
(référence à Little big man assez évidente,
ou pompage intégral ?) , à moins que toutes ces amours
supposées ne soient que des fantasmes. Il faut bien avouer,
avoir le choix entre Lin Dan Pham, Sarah Polley ou Diane Kruger, il
y a de quoi devenir polygame, non ? (ou schizophrène, ce qui,
dans un certains sens, revient au même)
Jaco Van Dormael est un petit génie de l’image, toujours
à rechercher celle qui va surprendre et en mettra plein la
vue au spectateur, tout le monde se souvient des tulipes qui dansaient
dans "Toto le héros"… Dans les années
90, cette esthétique un peu clinquante faisait mouche et nombre
de réalisateurs en panne d’inspiration ont puisé
dans cette mouvance.
En 2010, il faut bien avouer que toutes ces couleurs, ces cadrages
qui font semblant d’être déstructurés, ces
tout petits hommages à de vrais créateurs, donnent une
apparence clipesque ou publicitaire aux images, pas désagréables
mais un tout petite peu agaçantes (regardez comme je suis créatif
! alors qu’il ne s’agit, la plupart du temps, que de plagiat…).
Les trois histoires possibles, découlant d’un choix crucial,
sont racontées dans le désordre, et sans véritable
logique apparente (on est loin des échafaudages savants et
furieusement sensés d’un Inarrritu, pour ne citer que
lui…), du coup on est parfois un peu perdu et on se laisse bercer
par le confort de l’aspect formel, on ne cherche plus à
comprendre, on se laisse faire par les images chatoyantes…
Au bout du compte, on est un peu surpris par le manque d’émotions
ressenties, alors qu’il y avait la matière ; et puis
on se dit qu’effectivement le soin apporté à la
forme a empêché le réalisateur de se consacrer
véritablement à ses personnages, ils n’ont pas
d’âme, pas de présence. On hésite, quelques
heures après la vision du film, entre une preuve du génie
créatif, même un peu vaine, et un alignement de gadgets
visuels… quelques jours plus tard, le doute est levé,
il n’en reste vraiment pas grand-chose…