Comment faire un succès
au cinéma ? Prenez deux récents cartons au box office,
et prélevez-en ce que vous pensez être les clés
de la réussite. D’un côté, Dany Boon et
son personnage de doux allumé qui faisait mouche (on ne peut
pas dire merveille) dans Bienvenue chez les ch’tis, vu dans
les salles par un tiers de la population française ; de l’autre
côté, l’ambiance hors du temps d’Amélie
Poulain, ses images un poil sépias et bien chaudes, son histoire
qui ne se prend jamais au sérieux, son récit qui avance
par sketches, une petite tendance poétique et bric-à-brac
; et le tour est joué, on tient le film qui va plaire à
tout le monde, de huit à quatre-vingts ans, de l’ouvrier
au notaire, du plus petit village reculé au quartier le plus
branché d’une ville très culturelle…
Le résultat est décevant dans un sens, et absolument
rassurant dans un autre. Les émotions et la qualité
d’une œuvre ne sont pas calculables, ouf !
Ces mic-macs n’ont aucun charme, à force de rechercher
une saveur passée et perdue, Jeunet ne fait qu’aligner
des scénettes un peu jolies et légèrement amusantes.
Les personnages hauts en couleurs n’ont aucune réalité.
L’aspect conte de fées, sans doute voulu (avec la quête
impossible qui finalement aboutit avec l’aide des talents et
des pouvoirs décalés de tous ceux qui entourent le héros),
semble bien lourd, bien laborieux. On ne frémit pas une seule
seconde, on sait que Bazil, en digne cousin d’Amélie
Poulain pas si éloigné que ça, parviendra à
venir à bout de ses deux ennemis, des marchands d’armes…
dans le choix même de l’activité des méchants,
le cliché est énorme. Les acteurs n’ont même
pas l’air de s’amuser, ils font ce qu’ils savent
faire, tout coule dans le même sens, c’est du cinéma
paresseux dans le sens où il n’y a aucune mise en danger,
ce n’est pas poétique, c’est juste décoratif.