Voici un film à la juste
hauteur de son personnage. Profond, beau, serein le plus souvent,
et…austère. La nouvelle dont il est adapté se
passe en Allemagne et le réalisateur a choisi les Cévennes
pour situer son récit mais le contexte protestant est toujours
là, malgré ce changement de décor. Les choix
radicaux de mise en scène mettent en valeur la nature environnante,
hostile ou magnifique, appelant à la contemplation et à
l’humilité. L’histoire qui s’y déroule
est universelle, elle parle de justice et de son contraire, des
privilèges des puissants, de vengeance, d’amour, de
religion et de la peur que Dieu peut inspirer. On se perd parfois
dans les méandres du récit, les ellipses temporelles
et la manière de filmer les scènes d’action
ne contribuent pas à une compréhension pointue de
tout ce qui se passe. Pourquoi, tout d’un coup, Michael Kohlhaas
se retrouve-t-il face à ce religieux qui semble bien être
Luther ? Qui est cette princesse qui semble régner sur la
région ? Comment le jeune Baron parvient-il à s’échapper
du château lors de la première attaque ? On a beau
être loin d’un style académique qui donnerait
toutes les clés, on en vient parfois à se poser trop
de questions sur le récit lui-même. Cette réserve
mise à part, le film force l’admiration, Mads Mikkelsen
est impressionnant de présence, de charisme, de force tranquille.
Le rythme de l’ensemble a quelque chose de fascinant, on met
un certain temps à retourner à la vraie vie lorsque
la projection se termine, le velib que l’on emprunte alors
a des airs chevalins, on se prend à regarder le monde qui
nous entoure avec un air altier, et la chaîne rouillée
fait clitipiclop, clitipiclop… Chapeau, Monsieur Arnaud des
Pallières, de nous immerger à ce point dans cet univers,
sans pour cela recourir à des effets spéciaux hallucinants
ou à une foule de figurants. Le bruit du vent, le regard
d’acier de Mads Mikkelsen, la force des mots… tout cela
suffit !