Nombriliste, bavard, élitiste
(en particulier dans le discours sur le cinéma), c’est
le film qui a tout pour plaire aux addicts des journaux dit intellectuels
(Le Monde, Télérama, les Cahiers du cinéma,
etc), dépourvu de couleurs, plein de références
littéraires... une vraie source d’ennui, alors ? Eh
bien non, pas du tout, et en cela c’est déjà
une surprise ! Le personnage principal, un provincial débarquant
à Paris plein d’espoirs et d’illusions, est un
cliché sur pattes, tout comme les deux amis qu’il s’y
fait, l’homo (un peu) amoureux de lui toujours prêt
à aider, d’une gentillesse à toute épreuve,
et l’exalté radical, instable, épuisant, alternant
l’ombre et la lumière... Il en est de même des
personnages féminins, les « provinciales » du
titre, celle qui est restée en province et qui l’attend,
et toutes celles qu’il rencontre à Paris et avec qui
il a des histoires amoureuses, traçant une sorte de carte
du tendre contemporaine. Mais ces clichés ont l’intelligence
et le charme de ne pas persister, d’aller vers des parcours
inattendus, et surtout de parvenir à nous les rendre attachants,
en jouant sur un savant équilibre entre une écriture
ciselée et une interprétation très naturelle.
Quelques scènes sont des petits bijoux, comme ce baiser venu
de loin, dans la pénombre, d'une délicatesse toute
douce… Certes, tous ces personnages ne sont pas représentatifs
de la société française, ni même de la
population estudiantine, ils sont juste une petite poignée,
avec chacun une vie presque ordinaire, mais leurs échanges,
confrontations, osmoses parfois, ont quelque chose de très
particulier et donc très universelle parce que crédible.
Ils écoutent plus souvent du Bach ou du Mahler que du rap
ou Madonna, on les voit plus avec un bouquin à la main qu’un
téléphone portable, leurs sujets d’engueulade
sont plus en rapport avec la façon de faire du cinéma
qu’avec toute autre chose, mais c’est probablement pour
cela qu’on les aime, avec leurs petites trahisons, leurs mélancolies,
leurs errances, leurs passions...
Et merci à Laurence
C pour le conseil !