En apparence desservi par un
scénario nébuleux et parsemé de trous, ce film
d'un genre habituellement réservé aux hommes, est
réalisé par une femme, et c'est peut-être cela
qui permet d'y trouver de l'intérêt. Construit comme
une œuvre d'épouvante, mais où le danger ne serait
pas précisément identifié, le récit
prend son temps et adopte un rythme étrange, lent à
l'extérieur, nerveux et tendu à l'extrême pour
ce qui se passe dans le crâne du personnage masculin. A moins
que ça ne soit le contraire…
Le spectateur n'a qu'un seul point de vue, il ne saura rien de ce
que pense la femme, de ce qu'elle sait, de ce qu'elle craint ou
espère. Les autres personnages sont comme des éléments
du décor, certains dangereux, d'autres pas, mais la réalisatrice
choisit de nous mettre dans la même position que l'homme,
ce soldat hyper entrainé, n'ayant peur de rien pour lui-même,
réactif au moindre chant d'oiseau, ne comprenant pas grand
chose aux tenants et aux aboutissants de ce qui se passe sous ses
yeux. Le malaise qu'il ressent, nous le ressentons aussi, les bruits
qu'il entend, nous les entendons aussi, et le regard qu'il a pour
la femme qu'il est chargé de protéger, c'est aussi
le nôtre. On n'a jamais vu Diane Kruger aussi bien filmée,
dégageant une impression à la fois mystérieuse
et naturelle.
L'histoire peut laisser sur sa faim, la dernière image est
particulièrement énigmatique, fantasmatique ou réelle
? mais la forme donnée par la mise en scène est fascinante,
surtout par le travail sur la bande son, pas seulement musicale.
Voici un film singulier, étonnant, oppressant, plein de défauts
sans doute et absolument pas consensuel, mais qui fait un sacré
effet…