A priori, cela ressemble à
un cauchemar.
Mary est une petite fille moche, affublée de parents totalement
barrés, dans le mauvais sens du terme, elle est solitaire,
a peur que les autres se moquent d’elle, et bien sûr les
autres se moquent d’elle, elle vit dans une banlieue australienne,
un lotissement sans kangourous, sans aborigène, loin des opéras
de Sydney ou d’ailleurs, loin des plages à surfeurs,
loin de toute image préconçue que l’on pourrait
avoir de ce pays si exotique…
Max est un homme obèse, atteint du syndrome d’Asperger
(sorte d’autisme, pour faire court), vit entouré d’animaux
tristes dans une ville de New-York sinistre et a pour voisins des
handicapés de la communication.
L’histoire qui réunit ces deux êtres ne leur fait
pas de cadeaux, la vie est dure pour tout le monde, et elle l’est
encore plus pour certains.
Et ce qui est incroyable, voire sublime, c’est que ce récit
mélancolique, ce cauchemar éveillé, cet alignement
de claques à la bonne humeur n’est pas sombre ou désespéré.
Le regard porté sur ces deux-là est d’une grande
tendresse mais il parvient aussi à faire rire, à garder
suffisamment de recul pour nous les montrer aussi comme des personnages
de tragi-comédie.
Techniquement, c’est absolument parfait, et pas seulement du
point de vue de l’animation (toujours au service de l’expression).
Les éclairages, le travail sur le son (bel équilibre
des voix, contraste des ambiances bien différentes selon les
lieux), le choix des musiques audacieux, les cadrages jamais gratuits,
le montage, tout est au diapason pour produire un diamant noir dont
on sort curieusement comme sur un nuage, malgré l’absence
totale de concessions : on est loin, formidablement loin des conventions
morales, d’une quelconque leçon de vie où même-le-bonheur-peut-naître-du-désespoir…
L’émotion qui étreint le spectateur à la
fin n’a rien de convenue, elle surprend, elle serre le cœur,
elle est terrible.