"La fracture du myocarde",
vous en souvenez-vous ? Un film de Jacques Fansten de 1990, où
une bande d’enfants super-malins parvenait à cacher le
décès de la mère de l’un d’entre
eux, pour que celui-ci reste chez lui.
Dans ces "mains en l’air", il y a un léger
parfum de cet excellent film de… trente ans ! Ici, la bande
d’enfants est (presque) parfaite, malgré quelques passages
où l’on sent le texte bien appris et récité,
les échanges paraissent la plupart du temps crédibles,
spontanés, en accord avec les situations. Les adultes, au contraire
de beaucoup de films centrés sur l’enfance, ne sont pas
mal traités ou écartés. Valeria Bruni Tedeschi
(dont on ne peut pas ignorer, pour un tel sujet, de qui elle est la
belle-sœur) existe magnifiquement face aux enfants. Elle défend
son rôle de mère instinctive, pas parfaite, juste sincère,
parfois débordée mais amante et attentive.
Sur les bases solides de cette alliance de personnages, se construit
une histoire dont le sujet principal est la situation aberrante des
familles de sans-papiers, mais pas seulement. Ce n’est pas un
film purement politique ou seulement dénonciateur. Roman Goupil,
avec beaucoup de sensibilité, parvient à aborder la
question du bonheur pour un enfant au travers des plus belles scènes
du film, en Bretagne pendant des vacances formidablement chaleureuses,
de celles dont on ne voudrait jamais revenir.
Il n’y a pas d’angélisme ou de naïveté
dans le scénario, chaque victoire contre l’ordre établi
a son revers, et le récit de Milana devenue adulte contient
son lot d’amertume et de regrets.
La mise en scène, nerveuse et rendant compte de l’urgence
des situations, sait s’apaiser et offre des instants poétiques
et contemplatifs d’une très jolie délicatesse,
comme ces déclarations d’amour déguisées,
entre deux enfants qui regardent glisser les gouttes d’eau sur
une vitre (là, faut être super blasé pour ne pas
fondre).
Un film à voir en famille, qui pourra se retrouver à
l’origine de discussions essentielles entre parents et enfants.