Mademoiselle Chambon *

Stéphane Brizé

L'histoire

Adaptation du roman d'Eric Holder, autour de l'idylle qui se noue entre une institutrice, Véronique Chambon, et le père d'un de ses élèves, Jean, un maçon.


Avec

Vincent Lindon, Sandrine Kiberlain, Aure Atika

Sorti

le 14 octobre 2009

La fiche allociné

 

 

La critique d'al 1

Valse (presque) muette

 

Evacuons tout de suite tout ce qui est un peu irritant, les invraisemblances, les à-peu-près… les voitures sont immatriculées dans les Bouches du Rhône, et personne, mais alors, absolument personne n’a d’accent ; Sandrine Kiberlain, malgré un travail énorme semble-t-il, ne parvient pas à nous faire croire que c’est elle qui joue du violon, l’interprétation est trop brillante ; mais le pire, ce sont toutes les erreurs grossières sur la façon dont sont nommés les instits, impossible de changer de région chaque année, un instit est rattaché à un département… impossible aussi pour une directrice de recruter, les nominations sont réglementées par un système de points…
Cela n’a sans doute que peu d’importance, mais il semble qu’il aurait été relativement facile de modifier légèrement le scénario pour que la mobilité du personnage de l’institutrice soit crédible…
Du coup, quelques détails (et tout est dans les détails, dans ce type de film) sonnent comme des interrogations, sont-ils le fruit de la volonté du réalisateur, ou bien des erreurs supplémentaires ? L’exemple le plus manifeste réside dans la nature de la fenêtre que le maçon vient changer chez l’institutrice. À l’origine, il s’agit d’une belle fenêtre ancienne, parfaitement à sa place dans l’appartement plein de charme de Mademoiselle Chambon, et celle qu’apporte Monsieur Jean pour la remplacer est une fenêtre moderne, à double-vitrage certes (ce qui pour une musicienne est un avantage certain), mais qui du point de vue du style, ne convient pas du tout. Si l’institutrice violoniste s’extasie une fois le travail fait, est-ce sincère (et alors, il s’agit d’une erreur des accessoiristes), ou bien est-elle déjà sous le charme au point de ne pas voir l’absence de discernement du maçon, ou le voit-elle et décide-t-elle de l’ignorer ?
Ces remarques pourront paraître pointilleuses et relever plus du découpage des cheveux en quatre (le long des pointillés, pour faire encore plus instit psycho rigide…) que d’un commentaire éclairant, à défaut d’être éclairé. Il n’empêche, c’est perturbant.
Ceci étant établi, et malgré les doutes, le film est complètement et désespérément émouvant. Non pas par son histoire, qui en rappelle tellement d’autres, et qui sent puissamment le stéréotype. Les deux acteurs (et même quatre, si l’on rajoute Aure Atika, qui joue l’épouse, et le petit garçon, vraiment crédible), avec très peu de lignes de dialogues, installent des personnages marquants, profonds, éclairés de l’intérieur. Jeux de regards, intensité des silences, étreintes pesant des tonnes, Kiberlain et Lindon sont splendides. Enfin, surtout elle. Mais c’est vous qui voyez, avec vos yeux et vos penchants.
Mais plus encore que la grâce des comédiens, ce sont bien les partis pris de la mise en scène qui accrochent le spectateur. On retrouve la lenteur, les instants creux, les hésitations feintes que l’on avait découverts dans le très beau "je ne suis pas là pour être aimé". Chaque scène surprend, non pas par son contenu, mais par son rythme, toujours en suspension, accélérant au moment où l’on ne s’y attend pas, et pour le reste, laissant du temps aux échanges muets et ainsi allant jusqu’au trouble, parfois à la gêne… Les effets rendus sur le spectateur varieront bien sûr en fonction de ce que celui-ci est en train de vivre, sentimentalement parlant, mais ce qui est certain, c’est qu’ils ne seront pas procurés par une alliance banale, classique et convenue d’images romantiques et d’une musique sirupeuse, comme la plupart des comédies romantiques ou des tragédies amoureuses. Ce sont bien ces soupirs entre les mots, ces secondes d’éternité, ces glissements de douleur et de bonheur mêlés qui nous sont donnés à voir, à sentir. Les vibrations sont imprimées sur la pellicule, on oublie alors les erreurs précédemment évoquées, et on se laisse aller, c’est une valse, triste et presque immobile.

 

 

 

Vos commentaires

Elle joue du violon, lui est maçon, c’est très simple leur cœur fait crac boum… c’est d’une finesse, d’une sensibilité, d’une grande émotion tout est dans le regard et dans le geste, mais ça ne m’a pas fait vibrer et j’aurais aimé que le film s’arrête au départ du train.

Dominique P. le 20 octobre 2009


Lorsque j’ai vu la bande-annonce au ciné, je l’ai trouvée singulière par son absence de dialogues et de mouvements, pourtant il se passait quelque chose de fort ! je me suis dit je veux le voir celui-là… autre chose a résonné en moi en les voyant ne pas se regarder, ce qu’ils dégageaient c’était de l’amour et pourtant ils ne sont plus censés être un couple. Comment font-ils pour jouer ça ensemble ? Je voulais savoir…
Et je n’ai pas trouvé d’autres réponses en voyant le film que 2 magnifiques évidences : ce sont deux très très bons acteurs et ils ont dû passionnément s’aimer pour être capables (ou coupables !) de ces échanges si forts au cours de ce très beau film où tout est dans les regards, les gestes, la musique, (ben oui il n’y a pas que Mika qui peut me faire de l’effet !) ceci dit je suis sûre de ne pas reconnaître la musique si je l’entends à nouveau alors que la grâce de Sandrine Kiberlain, ses cheveux tombant sur sa nuque, les yeux de Vincent Lindon quand il la regarde jouer, et surtout les moments amenant à leur étreinte sur ce canapé sont gravés en moi pour leur beauté et surtout l’émotion qu’ils ont suscitée en moi.
Les doutes de Vincent Lindon transparaissent tellement quand il regarde au loin assis au bord de la mer, une scène maintes et maintes fois exploitée dans les films mais là portée, presque sublimée pour moi par le jeu d’acteur de Lindon.
Aure Atika ne dépareille absolument pas, beaucoup de femmes se reconnaîtront en elle, on a envie de la prévenir de ce qui arrive mais en même temps qu’est-ce que cela changerait ? elle est plus que juste et touchante lorsqu’elle comprend d’un seul regard ce qui se passe devant elle !
Un film où tout se passe de mots ! mais je n’ai pu m’en empêcher ! qu’est-ce que je voudrais savoir me taire et en exprimer autant !!!

Isabelle M. le 21 octobre 2009

 

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