Voici une étonnante façon
de traiter un sujet politique et historique méconnu et terrible,
le génocide de populations indiennes au Guatemala. Le film
ne montre rien des faits, des tueries organisées, mais se
concentre sur la douleur d'un peuple et le mépris que les
coupables leur renvoient. Le réalisateur place son récit
au cœur d'une famille dont le patriarche, un général,
est accusé d'avoir participé à ce génocide.
L'homme en question est misérable, pathétique, un
petit vieux dont les sursauts libidineux et quelques réflexes
de survie dérisoires sont les seules preuves de son humanité
en lambeaux. Autour de lui, il n'y a presque exclusivement que des
femmes, celles de sa famille, épouse, fille, petite fille,
et celles qui acceptent encore d'être ses employées
de maison. Cela pourrait se résumer à la description
d'une déchéance sordide, mais c'est bien plus que
cela, des fantômes rôdent, pleurent, réclament
vengeance en silence, les vivants rêvent, certains se terrent,
parfois épouvantés de leurs visions nocturnes, c'est
un spectacle mystérieux qui nous est donné à
voir, des impressions flottantes et des images fortes, la maison
du général est cernée par des manifestants,
l'ambiance sonore devient peu à peu lancinante, comme irréelle,
renforcée par de splendides plans séquences hypnotisants,
c'est beau et légèrement inquiétant, imprévisible,
lumineux et sombre exactement en même temps.