C'est un biopic, plutôt
classique, avec une histoire très américaine : comment
un type issu d'une classe sociale très défavorisée
parvient à devenir riche et célèbre. Mais c'est
aussi une histoire comme les affectionne Milos Forman, la destinée
d'un personnage hors-normes, un peu fou et brillant, épris
de liberté et de plaisir. D'une certaine façon, Larry
Flint a des ressemblances avec Amadeus…
Le film présente le magnat des publications à caractère
sexuel avec quelques uns de ses défauts, pour ne pas tomber
dans une hagiographie douteuse, mais il occulte le point de vue
de celles qui sont prises en photo pour ses revues. On peut imaginer
qu'aujourd'hui, en 2021, un tout autre film verrait le jour sur
le même sujet. Mais ce qui reste intéressant et toujours
d'actualité, c'est la croisade de Flint et de son avocat
(qui déteste la pornographie) contre le puritanisme, le pouvoir
des ligues de vertu et des religieux radicaux, et pour la liberté
d'expression. D'ailleurs, les procès qui lui sont intentés
n'attaquent pas, pour la plupart d'entre eux, le caractère
pornographique de ses revues, mais les satires violentes et souvent
politiques publiées malgré la censure. Il y a beaucoup
d'ambiguïtés et de contradictions dans la façon
de vivre de cet homme, ambiguïtés et contradictions
très américaines et sans doute un peu taboues dans
un pays où se trouvent à la fois Las Vegas et Salt
Lake City (la ville des Mormons). Probablement seul un réalisateur
d'origine étrangère pouvait aborder le sujet avec
ce qu'il fallait de recul et d'humour. Le film est parfois un peu
boursoufflé, avec des interprétations certes marquantes
mais pas très subtiles de Woody Harrelson et de Courtney
Love, mais il se laisse voir et en dit suffisamment sur la liberté
d'expression américaine pour garder de l'intérêt,
même quelques années après sa sortie.